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A ce stade précis du Rituel d'Initiation le Vénérable Maître prononce les paroles suivantes : « Monsieur (Madame), puisque telle est votre volonté, quoi qu'il arrive, de devenir Maçon. Et que c'est librement que vous acceptez les conséquences de toute cette rituelie ésotérique, sur vous-même et en vous-même , il vous appartient donc de continuer votre lente assimilation à l' Âme de notre Fraternité. Tout à l'heure vous avez bu le Breuvage de l' Oubli , destiné à vous dépersonnaliser, à vous enlever tout volonté propre. Voici une seconde Coupe, celle du Breuvage de Mémoire , l'Eau de Mnémosymée… Quand vous l'aurez absorbée, votre possession sera totale, absolue. L'Âme occulte de la Maçonnerie tout entière sera passée en vous. En n'importe quelle région du Monde, vous ne ferez plus qu'un avec tous vos Frères et Sœurs. Leurs amitiés, leurs répugnances seront les vôtres. Alors que l'Eau d'Oubli faisait de vous un corps sans vie, sans volonté propre, l'Eau de Mémoire, fera de vous le Maçon militant, le véritable Enfant de la Veuve. En trois fois, buvez, Monsieur (Madame). » Ce rituel n'est pas anodin et sans grande valeur ; au contraire, ce moment revêt un rôle fondamental dans la quête initiatique et ce simple geste contient trois symboles parmi les plus importants qu'un maçon doit retenir, afin de donner une pleine lumière à sa démarche. Ces symboles sont : la coupe, la boisson amère et la couleur verte. En commençant le Rituel d'Initiation l'Expert fait boire au Néophyte le breuvage de l'Oubli, d'un goût insipide, afin qu'en oubliant ses penchants passés puisse se dépersonnaliser et mourir à sa vie passée. Il ne s'agit pas de détruire les particularités de son caractère ou de modifier son destin, mais de maîtriser ses penchants afin de saisir la quintessence de son être et de le faire vivre conformément à son déterminisme. Il s'agit donc bien de renaître à une autre vie, plus consciente. Dans la mythologie grecque lorsque l'âme se présentait aux Enfers elle était confrontée à cinq fleuves, mais elle n'en traversait qu'un. Ces fleuves étaient l'Achéron (douleur) ; le Phlégéton (brûler) ; le Cocyte (lamentations) ; le Styx (horrible) ; le Léthé (oubli). Si l'âme traversait le Léthé, c'est qu'il lui était donné de se réincarner dans une autre vie. Or si le fleuve peut avoir différents aspects, c'est qu'il représente l'existence même et ses diverses manières d'être vécue. Descendant des montagnes, sinuant à travers les vallées, se perdant dans les lacs ou les mers, le fleuve symbolise l'existence humaine et son écoulement avec la succession des désirs, des sentiments, des intentions, et la variété de leurs détours. Au Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm nous ne faisons que reproduire cette tradition mythologique, consistant à marquer par ce geste le recommencement, auquel le néophyte est appelé. Après les épreuves rituelles une autre coupe est offerte à l'impétrant et celle-ci avant de lui laisser prononcer le serment, c'est-à-dire avant qu'il devienne un Franc-maçon. Cette fois il s'agit d'un breuvage amer, celui de Mémoire : l'eau de Mnémosymée. Si le premier breuvage avait le goût insipide de la vie profane et matérielle dans laquelle l'Esprit n'est pas encore éveillé, le deuxième apporte l'amertume de la vie de l'Initié, de celui qui cherche, de celui qui est tourmenté par le désir de connaître, mais aussi par la profonde solitude qu'il devra accepter pour découvrir soi-même. Le choc de ce goût amer éveille en lui la mémoire d'un monde passé, d'une unité primordiale dont il ne reste que le souvenir dans les formes acquises par les vertus que l'Initiation lui propose de pratiquer. Cette pratique le fera renaître à une vie plus spirituelle, dans laquelle il sera amené à gravir une échelle de valeurs autres et bien plus solides que celles de la pure existence profane. Un jour, lorsque l'initié pourra être considéré un Adepte, c'est-à-dire lorsqu'il sera parvenu à la sérénité, seulement alors il pourra goûter la douceur de l'Ambroisie. Même si ces trois phases nous reconduisent aux trois degrés fondamentaux de l'Initiation, le symbole lié à cette boisson est contenu dans la coupe. La coupe qui nous est plus connue est certainement celle du Graal de la légende celtique. Cette Coupe creusée dans l'émeraude et contenant le sang du Christ, que Joseph d'Arimathie porta en Bretagne, afin que l'Initiation puisse survivre et se perpétrer dans la recherche de chacun des hommes à l'esprit éveillé. A ce propos Fulcanelli disait : «Le Graal est le mystère le plus élevé de la chevalerie mystique et de la Maçonnerie qui en dégénère ; il est le voile du Feu Créateur , le Deus Absconditus dans le mot INRI, gravé au-dessus de la tête de Jésus en croix. Les Egyptiens possédaient aussi cet attribut : Sérapis est souvent figuré avec, sur sa tête, le même objet, nommé Gardal sur les bords du Nil. C'était dans ce Gardal que les prêtres conservaient le feu matériel, comme les prêtresses y conservaient le feu céleste de Phtah. Or, ce dieu Feu, ce dieu Amour s'incarne éternellement en chaque être, puisque tout, dans l'univers, a son étincelle vitale. C'est l'Agneau immolé depuis le commencement du monde, que l'Eglise catholique offre à ses fidèles sous les espèces de l'Eucharistie enclose dans le Ciboire, comme le Sacrement d'Amour. Le ciboire, aussi bien que le Graal et les cratères sacrés de toutes les religions, représente l'organe féminin de la génération, et correspond au vase cosmogonique de Platon, à la coupe d'Hermès et de Salomon, à l'urne des anciens mystères. Le Gardal des Egyptiens est donc la clef du Graal. C'est en somme le même mot. En effet, de déformation en déformation, Gardal est devenu Gradal , puis, avec une sorte d'aspiration, Graal . Le sang qui bouillonne dans le saint calice est la fermentation ignée de la vie ou de la mixtion génératrice. Nous ne pourrions que déplorer l'aveuglement de ceux qui s'obstineraient à ne voir dans ce symbole, dépouillé de ses voiles jusqu'à la nudité, qu'une profanation du divin. Le Pain et le Vin du Sacrifice mystique, c'est l'esprit ou le feu dans la matière, qui, par leur union, produisent la vie. » Le rite de la Coupe est la dernière épreuve avant que le néophyte ne prononce le serment d'Initiation maçonnique et que la Lumière ne lui soit donnée. Ce moment est donc le plus important et son ésotérisme n'est pas assez étudié. La couleur verte est celle de l'émeraude et par conséquence celle du Graal. Elle est aussi celle du plan « astral », l'intermédiaire entre le plan physique et les plans supérieurs, spirituels. Dans la tradition orientale, du système énergétique régissant l'être humain, le vert est la couleur du 4 ème Chakra, celui du cœur. Ce dernier se situe entre le trois premières d'en bas et les trois d'en haut, il est le chakra de la fusion équilibrée entre la matière et l'esprit. Le vert est la couleur des corps en décomposition, mais aussi de la nature renaissante, d'ailleurs la disposition zodiacale du processus alchimique situe en Taureau le travail intérieur à la matière, juste avant la calcination . Nous savons que la planète Venus, à laquelle on attribue la couleur verte, est en domicile dans le signe du Taureau ; c'est alors que en ce signe de couleur verte le mouvement lent et constant commence à produire les prémices vitales. Le vert représente ainsi une phase transitoire de l'évolution ; la même transition est confiée à la Coupe d'amertume. Il est à noter que dans la liturgie catholique, le vert est employé pour les ornements sacerdotaux du deuxième au sixième dimanche après l'Epiphanie et à tous les dimanches après la Pentecôte ; c'est-à-dire dans l'attente, l'espérance des deux pivots du Catholicisme : Pâques et Noël. Si, donc, la couleur verte représente le travail intérieur de
la naissance et de la renaissance, comme transformation de la matière par
l'esprit, c'est-à-dire par le feu créateur, il semble tout à fait logique et
naturel, que la lumière centrale sur nos autel et sur le plateau du V Georges CARPINTIERI O n entend souvent dire, en Franc-maçonnerie : « l'ambiance n'est pas celle que j'aurais aimé trouver » ou « il y avait une belle ambiance, on s'est bien amusé » et encore « l'ambiance n'est pas assez spirituelle »… Pourquoi ce mot « Ambiance » revient tout le temps comme si l'on devait juger une fête familiale ou une boom d'adolescents ? Qu'est ce qu'on demande à la F L'ambiance est quelque chose d'extérieur et de préfiguré qui doit accueillir les Maçons ou c'est le fruit de nos attitudes et donc quelque chose que nous devons construire ensemble ? Dans le premier cas il faudrait que les structures maçonniques organisent des « journées portes ouvertes », afin de montrer les diverses ambiances proposées et que chacun puisse choisir celle qui lui convient le plus. Mais dans le second cas nous ne pouvons que juger nous-mêmes, car le fait de s'en prendre à une ambiance, positivement ou négativement, veut dire se considérer extérieurs à celle-ci et déléguer les autres à la tâche ardue d'interpréter nos souhaits cachés et intimes, pour organiser au mieux la structure dans laquelle nous pourrions nous épanouir à notre gré. Cette attitude est très proche de l'exploitation d'autrui. Mais ne pensons pas à cela, car nous sommes tous FF Regardons de plus près ce mot « Ambiance » et, surtout, dans sa relation avec l'Initiation. Le Petit Robert : Dictionnaire de la Langue Française : Ambiance : atmosphère matérielle ou morale qui environne une personne, une réunion de personnes. Cette définition nous montre que l'ambiance dépend aussi bien
d'une personne que d'un groupe. Dans le cas d'une Loge Maçonnique les deux
sont en cause : le Franc-Maçon avec son apport personnel et son senti,
les FF Rentrons en Loge… L 'ambiance harmonieuse, faite d'amour et ornée par la beauté, que nous souhaitons pour une Loge Maçonnique, est la conséquence de la fraternité et de l'amour entre les Francs-Maçons. Un amour capable de transformation vers un progrès de l'être dans l'action consciente, non soumise aux passions mais aux conseils de la conscience profonde. Un amour presque divin ou, de toutes façons, en condition de concevoir les diversités de chacun comme des manifestations tangibles de l'unité primordiale. Les SS La pensée initiatique constitue la mesure de cet amour fraternel, dans le sens qu'elle doit former les initiés à ne plus concevoir la fraternité comme une sensiblerie ou une camaraderie, mais comme conscience d'un ensemble de complémentarités d'une seule et unique harmonie. Par conséquent cette philosophie particulière, que nous définissons initiatique, a l'allure d'un travail tendant à la perfection d'une harmonie d'éléments au service de la raison humaine. C'est pour cela que tous les grades maçonniques sont structurés autour de mythes et légendes referant d'actions ou d'événements liés aux manifestations de la vie humaine dans ses aspects multiples et différents. L'amour fraternel, conçu ainsi, ne peut qu'être la grande motivation de cette ambiance harmonieuse, à ne pas confondre avec plaisante, qui est mystérieuse par définition, car motivée par un sentiments impalpable et impossible à contraindre dans un cadre préconçu, mais dévouée au service du développement de la raison humaine, afin que l'Homme comprenne la fraternité et devient « fraternus ». La démarche spirituelle, qui dans la matière se transmute en réel sentiment d'amitié, ne peut qu'être la conséquence de cette harmonie et en Franc-Maçonnerie de cette ambiance particulière finalisée au travail pour la construction du chef-d'œuvre de chacun. N'oublions pas que, à notre niveau, la spiritualité doit être ancrée dans la vie, à ne pas confondre avec l'existence même si les deux interfèrent fréquemment et inexorablement, afin que le déroulement de cette dernière dans la matière devienne une pensée d'amour pour la paix et l'accord, intérieur à l'être et extérieur entre les êtres. A ce stade de la transmutation des êtres dans le creuset de l'Initiation, l'ambiance peut nous conduire devant un choix, souvent très difficile à faire : la spiritualité comme rêve éveillé éloigné de la réalité de la vie et prisonnier de l'assouvissement de nos fantasmes bouillonnants. La deuxième voie est celle de la compréhension d'autrui en tant que personnalité différente, manifestation de la divinité qui est en nous ; mais la compréhension implique, dans ce domaine, l'acceptation et non le renfermement dans le refus : pourrions-nous refuser les doigts de la main, car différentes des oreilles, que nous aimons tant ? Alors la spiritualité doit rechercher sa mesure dans la raison (certainement pas dans la rationalité) qui seule peut nous faire discerner le bon choix. La raison est lumière : un éclairage qui procède par analogies, par comparaisons, par rapports, donc par géométrie, d'ailleurs le cerveau humain est géométrique. Mais le raisonnement géométrique peut être appréhendé plus dans l'action que en dévorant des livres de mathématique, car la géométrie est une abstraction intellectuelle de l'action de l'homme sur la planète ; voilà pourquoi la raison est à l'origine de l'action cognitive, du savoir, même de celui caché. Cet action pour le savoir, cet Œuvre Royal mesurera l'ambiance initiatique, par son degré d'activité et de savoir. L'action et le savoir constituent le milieu dans lequel se manifeste l'ambiance initiatique. Ici le discours se retourne impitoyablement et inévitablement vers nous et vers nos consciences : de quel droit critiquer une ambiance alors qu'on n'est pas disposé à agir à tous les niveaux pour le savoir ? de quel droit condamner lorsqu'on pratique l'abstentionnisme des responsabilités ? Peut-on séparer l'administratif de l'initiatique par un simple décret, là aussi nous serions dans l'administration ! Chaque action est constituée de deux face : la théorie et la pratique, l'idéologie et l'activisme, l'initiatique et la gestion de la structure initiatique. Tous ceux qui croient pouvoir séparer la matière de l'esprit, produiraient une mutilation grave à l'initiation, car elle a son fondement sur les deux colonnes : la blanche et la rouge ; c'est impossible d'enlever un des chevaux au chariot de la lame VII du Tarot, mais aussi un des jumeaux dans la lame XIX ou une des femmes à l'amoureux de la lame VI. Le parcours initiatique se déroule toujours entre deux éléments opposés, c'est au Maître de les concilier, comme il a su accorder la raison et l'intuition sensible. Nous sommes rentrés dans la Loge pour en étudier l'ambiance…sortons maintenant et, depuis cette action de connaissance, regardons en face la même ambiance. Soit nous sommes convaincus du fait que la « révélation » peut nous apporter la connaissance dans sa totalité et dans ce cas il ne nous reste qu'à faire des miracles et marcher sur les eaux ; soit, plus humblement, nous nous limitons à acquérir le savoir par une recherche longue et patiente et alors la grande aventure de la connaissance s'ouvrira devant nos yeux…mais n'oublions pas l'action nécessaire à la conquête du savoir. Tout comme l'apprenti charpentier ou tailleur de pierre observait, affûtait les outils, étudiait les tracés, donc, travaillait pour gagner sa maîtrise du métier ; ainsi celui qui veut savoir doit travailler et d'abord sur soi-même, afin de se débarrasser de sa carapace de lieux communs et d'idées préconçues, qui occultent le vaste domaine de la science. La capacité au travail est le plus grand patrimoine de la connaissance, car il ouvre toutes les portes et fait dépasser tous les obstacles dans le chemin vers la Lumière. C'est pour cela qu'on dit que le travail est le mobil de l'état humain, l'Homme quitte sa bestialité limitée uniquement à la satisfaction de ses besoins primordiaux, pour entreprendre un cheminement lumineux à la découverte de soi-même et d'autrui. Mais, comme le montre la lame IX du Tarot, ce chemin doit être parcouru en solitude et à la recherche du « pourquoi » des choses : les plus proches et les plus éloignées. La seule compagne de route sera la conscience, qui nous parlera dans le silence profond d'une nuit étoilée ou en contemplant un champ fleuri. La Loge sera la création de ces consciences accrues des hommes et des femmes qui ont mis la « patte » à l'œuvre sur le chemin de la haute science ; peut-être que le chemin de Damas de Paul était aussi cela. La Loge comme ensemble de consciences constitue l'épreuve majeure à laquelle est soumise l'ambiance, car des hommes et des femmes sans la conscience de l'œuvre et de la solitude initiatique ne pourrons qu'engendrer une atmosphère de buverie et de festin profane ou de magouilles en affaires…mais aussi de dogmatisme et de hiérarchies rigides et autoritaires par le mépris des différences. Afin d'éviter ceci, il faut que la Loge soit équilibrée par la volonté de service au mystère du changement, de la transmutation des valeurs comme des hommes mêmes. Ce service, dans les contenus, et le mystère, dans les formes, constitueront le mobile de la vie dans laquelle l'initié vivra et se réalisera ; être maçon à l'intérieur et à l'extérieur du Temple veut dire exactement cela : servir le grand dessin, qu'un initié doit connaître ou apprendre à connaître. Ce genre de vie, faite de sensibilité, instruite par une
réelle connaissance intégrée par l'être, éclairée par la raison, engendrera
comme conséquence le progrès de ceux qui la vivent et qui deviennent les
maîtres d'œuvres historiques et
traditionnels de l'évolution de l'Humanité. Lorsque le progrès sera la
finalité de la connaissance initiatique, alors seulement l'ambiance y
trouvera son meilleure patrimoine, mais la condition sera toujours que le
progrès même s'équilibre dans le travail fait avec amour et pour la
perfection harmonieuse. Je me permet de conclure en vous rappelant, mes SS Que ceux qui ont des oreilles entendent, que leurs yeux voient, que leur âme comprenne. J'ai dit. Georges
CARPINTIERI LE MAILLET Il faudrait parler des trois ensemble, car l'action de l'un ne peut pas être envisagée sans répercussions sur la fonction des autres. L'œuvre royale est faite avec le concours de tous les outils et la première habileté d'un bâtisseur se manifeste dans le choix du bon outil au bon moment. C'est le travail du Maître… Mais s'agissant du grade d'Apprenti, je préfère traiter ces outils séparément, car l'Apprenti doit d'abord se familiariser avec ceux-ci et apprendre à les manier avec précision et pertinence. Jules BOUCHER, dans son ouvrage « la symbolique maçonnique » attribue au maillet la vertu de la Persévérance , tandis que Robert AMBELAIN, dans « symbolique maçonnique des outils », lui attribue celle de la Tempérance . Il ne faut pas rentrer dans le débat sophiste sur cette différence de définition, car cela est stérile d'abord et ensuite on s'aperçoit vite que les deux vertus coexistent dans le même symbole. Le maillet est un outil, donc un objet fabriqué qui sert à agir sur la matière, à faire un travail…c'est un gros marteau. Il sert pour battre sur quelque chose : un clou, un ciseau, un pieu…Lorsque nous battons avec un marteau il nous faut faire recours à une certaine force du bras, et non pas n'importe quel force : le travail que nous avons à faire nous indiquera le type de force à employer. Donc le dosage de cette dernière sera la première obligation de notre action avec le marteau. Mes en même temps le recours à cet outil est du à notre volonté de travailler, donc à l'objectif que nous nous sommes données et au plan de travail que nous avons préalablement établi. Ce même plan nous guidera sur le choix du matériau et ce dernier nous donnera des indications précieuses sur la qualité de notre action : elle devra être plus ou moins précise, plus ou moins violente, toute notre attention sera appelée à intervenir, notre capacité à être perspicaces sera mise en éveil. La comparaison avec l'usage réel du maillet nous autorise à employer la métaphore de la Volonté Active de l'Apprenti. Lorsque l'Apprenti est rentré en Loge Maçonnique il a fait acte de Volonté . La Volonté lui est indispensable pour affiner son action dans son amélioration intellectuelle et spirituelle, dans l'élimination de ses métaux, dans ce travail global et en profondeur sur soi-même. Vouloir n'est pas simple, car pour avoir satisfaction de ses désirs il faut Savoir comment les satisfaire sans blesser les autres, sans dominer l'entourage, sans faire acte de démagogie ou d'un autoritarisme souvent dangereux. Alors nous nous apercevons que ce Savoir est acquis à travers une série des Devoirs , qui forgeront notre personnalité et affineront notre vue sur ce qui nous entoure. Seulement ensuite nous pourrons dire, avec joie et pondération : « Je Peux satisfaire ma Volonté ! » Ici nous sommes en présence du danger de la Volonté, danger bien symbolisé par le poids du maillet : la volonté sans contrôle, la boulimie, la gourmandise ou encore la volonté sans constance, liée aux caprices du moment. Pour tout cela, nous pouvons mieux cibler la symbolique du maillet : Lorsque nous voulons par caprice, sans avoir réfléchi, nous devenons les victimes, parfois les pantins, des émotions passagères, de la futilité, de la passion ; une démarche initiatique ne peut pas se faire selon le bon vouloir de la journée ; cela nécessite de la persévérance, sans cette vertu aucun plan n'est possible et sans plan nous ne bâtissons pas, mais nous nous complaisons des images virtuelles de notre esprit fantaisiste. Néanmoins persévérer ne veut pas dire s'entêter sur des projets impossibles, comme certains rêves de certains initiés, plus sensibles à la nostalgie pour un passé désormais révolu, qu'intéressés à comprendre la leçon de ce même passé pour bâtir l'avenir. La Persévérance doit s'accompagner de la Tempérance , afin que dans toutes choses la sensibilité intuitive de chacun soit ordonnée par la raison, afin que la connaissance qui nous vient des sens soit expliquée et rangée par la géométrie du cerveau. La Tempérance, symbolisée par le maillet, « se manifeste en divers aspects : • La continence, consistant à choisir de ne pas suivre aveuglément les mouvements violents de la passion ; • La clémence, consistant à modérer ou régler, selon la vertu de Charité, un mode correctif du mal commis par autrui, et que la vertu de Justice exige de voir plus équitablement corrigé ou expié, choses inéluctablement nécessaires ; • La mansuétude, consistant à écarter le mouvement intérieur de la passion d'équité, lequel ne serait plus alors que la Colère ; • La modestie, consistant à réfréner, modérer ou régler la partie affective en des choses moins difficiles que les précédentes, c'est à dire le désir de sa propre excellence, le désir de connaître ce qui ne nous est pas immédiatement utile, ou ce qui est inutile par la suite à la suite à notre vie maçonnique et spirituelle, les actions et les mouvements extérieurs de notre corps charnel, et enfin la tenue extérieure quant à la manière de se comporter ou de se vêtir et orner… • La tolérance, consistant à respecter les opinions et les croyances d'autrui comme l'on voudrait que l'on respecte les siennes propres… Faut-il rappeler le texte de la déclaration des Droits de l'Homme : « nul ne saurait être inquiété pour ses opinions, même religieuses… » ? Il est bien évident toutefois que la Tolérance ne saurait s'appliquer à qui la veulent détruire. Il n'y a pas de Liberté pour ceux qui veulent étrangler la liberté ! • Le libéralisme, consistant à ne point prétendre obliger autrui à vivre selon des principes, des croyances, des usages, des coutumes et des prescriptions, auxquelles il se refuse à attacher une importance ou une valeur quelconque. Le libéralisme est toujours le propre des esprits équilibrés, généreux et bons. Son contraire est le sectarisme, dont l'aspect le plus courant est le puritanisme… » (R. AMBELAIN : SYMBOLIQUE MACONNIQUE DES OUTILS) Comme vous voyez la Tempérance est une des plus grandes vertus d'un Franc-Maçon, mais aussi une des plus difficiles à acquérir, car elle impose une pratique constante des principes sus exposés, afin que de simples affirmations de principe deviennent, progressivement, des qualités exercées avec conscience et enfin des reflex normaux dans les agissements quotidiens. La Persévérance est la clef de voûte de la Tempérance et sans elle cette dernière reste une chimère séduisante, mais jamais atteinte. Acquérir ces vertus est le premier engagement d'un Apprenti, ensuite il se posera la question du discernement, de l'analyse pointue, de la précision de jugement et alors il pourra découvrir un autre outil dans la caisse que les Maîtres du chantier lui ont confié à son entrée dans le chantier du Temple : cet outil sera le Ciseau. D'autres analogies ésotériques peuvent être évoquées par le maillet, mais pour votre instruction du moment contentez-vous de découvrir les secrets du maillet et d'apprendre à battre, battre et encore battre sur votre pierre brute. Sachez que vous devez conduire seuls cette recherche, car la solitude est l'état privilégié et fondamental de l'initié : un tailleur de pierre agit seul en compagnie de ses outils, ainsi l'introspection constructive de votre être renouvelé ne pourra bénéficier d'aucune aide, mais uniquement de votre force, de votre persévérance, de votre conviction dans l'œuvre. Une fois votre pierre taillée, une fois sellée dans le mur du Temple, vous serez conscients du fait qu'elle était indispensable à parfaire la Beauté de l'édifice, car elle portera en soi votre force, les moments précieux de votre vie, votre amour pour l'œuvre commune et pour la tâche, qui vous a animé pendant votre apprentissage J'ai dit Georges CARPINTIERI Le tablier maçonnique, est-il un décor, un attribut, un symbole, un outil ? C'est, peut-être tout ça ensemble. Une chose est certaine : nous ne pouvons pas parler d'un aspect du tablier sans engager l'autre ; j'essaierai alors de donner un aperçu global de ce polygone en peau blanche (ou décorée), qui est le tablier du Franc-Maçon. Mais avant tout regardons les étymologies de ces termes : • Décor : 1) ce qui sert à décorer un édifice…2) Représentation figurée du lieu où se passe l'action…3) Aspect extérieur du milieu dans lequel se produit un phénomène, vit un être…(Petit Robert) • Attribut : 1) Ce qui est propre, appartient particulièrement à un être, à une chose…2) Emblème caractéristique qui accompagne une figure mythologique, un personnage, une chose personnifiée…(Petit Robert) • Symbole : Métaphore qui a son fondement dans la raison et son correspectif dans la réalité (Pierre Vincenti PIOBB) • Outil : 1) Objet fabriqué qui sert à agir sur la matière, à faire un travail…(Petit Robert) L'apprenti est appelé à quitter ses métaux, c'est à dire à travailler sur sa pierre brute, par conséquent il a besoin d'objet fabriqués pour cette action : le ciseau, le maillet, le tablier : nous pouvons, donc, affirmer qu'il s'agit là d'un outil selon l'étymologie du mot. En effets le tablier en peau blanche de l'apprenti maçon
sert à le protéger symboliquement des éclats de cette pierre, qu'il doit
dégrossir avec force et détermination ; par ce même fait le port du
tablier blanc, bavette relevée, le distingue des autres FF En présence de ce simple tablier les Maîtres et les Compagnons seront confrontés à leur conscience, car, s'ils avaient su quitter leurs métaux, s'ils avaient vécu correctement leur apprentissage, s'ils avaient appris la vertu de prudence, en aucun moment ils n'abuseront de leurs grades pour affirmer une supériorité quelconque, aussi vide que ridicule, mais ils sauront se montrer et être disponibles, compréhensifs et observateurs afin de montrer dans les faits le chemin difficile de l'évolution personnelle. Avant d'en rappeler les significations symboliques, nous voyons ici le tablier comme attribut et décor du Maçon. Cela confirme l'attitude opérationnelle qu'un Maçon ne doit
jamais oublier : un F C'est depuis l'usage réel qu'on peut comprendre un symbole : un maillet sert pour battre sur le ciseau ; un compas pour tracer des cercles ; une règle pour mesurer ; etc. Un Maçon ne se reconnaîtra qu'au pied du mur, qu'il aura su bâtir ; tout le reste n'est qu'une vision gratuite de l'esprit. Il nous reste à analyser brièvement la signification symbolique du tablier. Pour cela je vous renvoie à la copieuse bibliographie sur le sujet ; je m'attacherai uniquement à quelques symboles considérés plus fondamentaux que d'autres, surtout au grade d'apprenti. Robert AMBELAIN affirme que le tablier est avant tout le symbole de la « prudence » : vertu fondamentale pour l'initié. Cela est déjà signifié par les trois sommets du triangle : l'apprenti doit apprendre à tenir compte du motif de chaque fait, afin d'en prévoir les conséquences. Cette pratique permet d'être prudent et de maîtriser les passions et les émotions, qui poussent à agir hâtivement sous les impulsions plus basses de l'individu, indépendamment du raisonnement, caractéristique majeure et unique de l'être humain. Une attitude prudente nécessite la maîtrise de l'orgueil et de l'ambition personnelle, au profit d'un équilibre savant et subtil de l'esprit et de la matière, du coté masculin et féminin de l'être. C'est tout le travail de dégrossissage de la pierre brute ! Et les tailleurs de pierre nous apprennent que les éclats sont souvent source de graves blessures, pour cela il faut se protéger et notamment sur les chacras plus bas, d'où provient l'énergie terrestre : la plus forte, la plus passionnée, la plus violente. L'éveiller inconsidérément ne servirait pas le travail de maîtrise de la personnalité. La protection du 1 er , 2 ème , 3 ème chacras obtenue par le port du tablier, marque cette séparation entre matière et esprit nécessaire d'abord pour les équilibrer, avant de rabattre le haut sur le bas, la bavette sur le tablier. Analyser, expérimenter, comprendre, agir avec prudence : c'est le travail de l'apprenti. Avant d'éveiller le plexus solaire, par l'action de la force terrestre, il faut explorer les profondeurs de l'être et méditer sur le déterminisme individuel. A ce propos observons encore la forme du tablier : un pentagone. Le pentagone est une des trois « figures mères », elle nous révèle l'aspect sensible de l'être et des choses : les cinq sens, éléments primordiaux de la connaissance. Les philosophes disent : « toutes connaissances nous viennent des sens » mais je rajouterais : « c'est la raison qui nous en expliquera l'essence » Les sens nous donnent accès à la matière, sur laquelle et avec laquelle nous bâtirons notre cathédrale. Voilà pourquoi l'apprenti a accès à la terre par les sens : la terre est le premier élément auquel il est confronté dans le cabinet de réflexion. Mais ça sera par sa sensibilité qu'il pourra s'en élever. Je termine ici ma petite et certainement incomplète analyse du tablier d'apprenti, en renvoyant celui-ci à des études et des réflexions plus approfondies. Néanmoins je tiens à souligner que le tablier est un outil de travail ; ça veut dire qu'un maçon doit travailler, afin de grandir et que sa valeur se mesure dans les résultats concrets obtenus. Comment voulons-nous améliorer l'homme et l'humanité, si nous nous employons à gratifier notre Ego et à satisfaire la soif de décors et de pouvoir ? Ne mourrons pas étouffés, ensevelis sous les éclats de notre pierre brute ! Alors, si j'étais incapable de démontrer ce que j'affirme, si le pouvoir m'aveugle, si je n'étais pas disponible envers vous, si je ne savais pas vous comprendre et vous aimer, mes Sœurs et mes Frères, revêtez-moi d'un tablier blanc d'apprenti et renvoyez-moi dans le cabinet de réflexion, afin que de mon être putréfié et calciné puisse un jour en sortir la quintessence, dans une vraie réalisation de l'être. J'ai dit Georges CARPINTIERI LES OFFICIERS DE LA LOGE On peut ainsi comprendre qu'un Officier mal choisi ou négligent, met en difficulté l'association, il manque à son serment et abuse de la confiance de ses Frères et Sœurs. Dans le monde profane, un Officier militaire peut mettre en danger la vie de ses soldats par ses décisions et son attitude erronées ; un mauvais Conseiller d'administration peut provoquer la faillite de sa société…mais dans le monde maçonnique on a tendance à penser que tout cela n'arrive pas et alors, puisque rien n'arrive en Loge, un Officier peut être négligent, absent, ignorant ! D'une part la fraternité et la tolérance régissant notre Initiation doivent nous faire dépasser ces fautes et nous amener à comprendre des Sœurs et des Frères incapables de tenir un engagement : c'est leur déterminisme, leur nature. D'autre part ce sera leur miroir individuel qui reflètera impitoyablement le ridicule dont ils se sont recouverts pour avoir voulu assumer une charge trop grande pour leurs capacités réelles. Il ne faut pas oublier que dans l'Initiation chacun est le juge de soi-même, mais que la Conscience ne rate jamais un jugement. Si les Officiers semblent être aussi importants pour une Loge Maçonnique regardons de plus près leurs rôles, aussi bien administratifs et donc exotériques, qu'ésotériques. Je traiterai ce sujet en me referant à la disposition
« zodiacale » des Officier en Loge et aux rapports avec les
planètes respectives, selon la théorie élaborée par le T La Loge est orientée selon les quatre points cardinaux et à chacun d'eux correspond un Officier. Nous pouvons, donc, affirmer que ces Officiers « orientent » la Loge. Il s'agit du Vénérable Maître, siégeant à l'Orient ; du Couvreur, dont la place est en face c'est-à-dire à l'Occident ; du 1 er Surveillant à la Colonne du Midi et du 2 nd Surveillant, siégeant à celle du Septentrion. Ces quatre Officiers définissent l'espace sacré d'un Temple Maçonnique, sacré parce qu'à son intérieur se déroulent toutes les cérémonies initiatiques maçonniques, mais aussi parce qu'ils sont, tous les quatre ensemble, responsables du principe de « simultanéité » initiatique, celui considérant qu'aucune action, profane ou initiatique, ne peut pas se matérialiser correctement sans le respect simultané de quatre absolus : Pouvoir, Savoir, Vouloir et Devoir. S'il s'agissait uniquement de réaliser ces principes de toute bonne gestion administrative, ce serait certainement plus simple que la réalité d'une Loge ne le montre... Les choses deviennent plus complexes lorsqu'on rentre dans les considérations ésotériques et surtout au Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm, qui se refère explicitement à la philosophie spirituelle gnostique. En effets les quatre Officiers délimitant l'espace matériel dans lequel l'initié doit évoluer lentement et avec persévérance, représentent les quatre éléments fondamentaux de la nature terrestre : la Terre, l'Eau, l'Air et le Feu. Ces éléments sont propres aux signes zodiacaux du Capricorne, du Cancer, de la Balance et du Bélier, dominés par les planètes Saturne, la Lune, Vénus et Mars. Ces signes sont dits Cardinaux comme Cardinales sont les Vertus qui s'y rattachent : Le Feu à la Force...le Bélier à Mars...le Couvreur à la Connaissance L'Air à la Justice...la Balance à Vénus...le Vénérable au Pouvoir L'Eau à la Tempérance...le Cancer à la Lune...le 1 er Surveillant au Devoir La Terre à la Prudence...le Capricorne à Saturne...le 2 nd Surveillant au Vouloir Ces quatre Officiers, piliers de chaque Loge maçonnique nous indiquent donc l'ancienne règle templière celle du VSPD (vouloir, savoir, pouvoir et devoir) c'est-à-dire : « Un initié devra vouloir prudemment, afin que l'avarice ne s'empare pas de son être. Car l'envie de possession, sans mesure et sans partage conduit l'homme à la prison de la matière. Cette prudence s'acquiert par une solide et progressive connaissance : la connaissance de la vie, de la pensée, des messages symboliques, de la sensibilité artistique et de tout ce que la tradition transmet comme valeur universelle. Un savoir qui est la force motrice de toute évolution humaine et le propulseur sur le difficile chemin de l'Initiation. Un savoir qui ne laisse pas agir sous l'impulsion des passions, mais qui confère la maîtrise à celui qui sait attendre. Un savoir qui s'oppose à la paresse, par le travail continu et profond qu'il exige. Un savoir, enfin, qui offre le pouvoir d'agir en équilibre avec soi-même et avec les autres, donc en pleine justice ; non pas la justice du juge, mais l'acte juste, mesuré, pondéré. Ce dernier opposé à la luxure, faite d'image éphémère et fugace, fruit de nos désirs morbides et incontrôlés. La conscience de l'équilibre, du juste moment pour la juste cause, permet à l'initié de prendre pleine conscience des devoirs auxquels il ne pourra plus se soustraire, car il a désormais aperçu la Lumière. La vision de la lumière ineffable, pour laquelle chaque Maçon travaille avec force et vigueur, apprend à l'initié le sens du relatif et de l'absolu. En d'autres termes il ne peut plus se considérer comme le centre d'un univers personnel et limité à sa matière ; pour cela il commence à tempérer son esprit et à repousser la gourmandise, la compagne de la boulimie, aussi bien intellectuelle que matérielle. Il découvrira qu'il y a un temps pour tout : un temps pour étudier, un temps pour intégrer, un temps pour parler, un temps pour diriger, un temps pour obéir, un temps pour réfléchir et un temps pour sourire, un temps pour transmettre. Cela va de soi que ces quatre rôles constituent les gonds de la porte initiatique et que leur valeur ne peut pas être sous-estimée ou prise à la légère sans détruire à jamais le sens profond de l'Initiation. A ces Officiers représentants la simultanéité statique de la Loge, la pierre de fondation du Temple Maçonnique, il faut en rajouter trois qui rappelleront le temps et donc le devenir du processus initiatique. Mais le Temps est un mystère, personne ne connaît exactement sa nature profonde au de là du temps relatif (scientifique) qui est la répartition en parties égales d'une rotation terrestre autour du soleil. Le Temps, comme devenir, est lié au mouvement, c'est-à-dire au jeu savant des forces cosmiques et de leur attraction réciproque. Alors il nous suffit de retenir l'idée de Dante que : « l'Amour fait bouger le Soleil et les autres étoiles » et remettre la notion de Temps au domaine métaphysique et inconnaissable. Par conséquent nous ne nous étonnerons pas de voir les relations entre les trois Officiers restants et les trois Vertus Théologales, car par ces principes nous engageons les discours sur le Logos, le Verbe ou le Divin. Les Officiers qui rendent une Loge Juste et Parfaite sont : l'Orateur, le Secrétaire et le Maître des Cérémonies. L'Orateur, principe solaire, élément masculin, est le garant de l'esprit de l'Initiation. Il agit pour la fidélité au logos, au verbe créateur, au principe métaphysique. Sa rigueur ne sera jamais du rigorisme ou de l'intolérance, mais de la compréhension et de la synthèse. C'est ainsi qu'il ne cédera pas à l'orgueil, personnel ou collectif. Le Secrétaire, principe lunaire, élément sensible et féminin, est la mémoire et la forme permettant la structuration du message initiatique qui accroîtrera le patrimoine traditionnel. Dans ses mises en forme la sensibilité inspirera toute action maçonnique et il la transmutera en charité, offrande sublimée et non aumône, matérielle ou intellectuelle. Pour cela le Secrétaire sera toujours très rigoureux dans l'usage des formes, car dans ce domaine sensible on risque à tout moment de céder à la sensiblerie et le formes éveillent en nous les envies, c'est-à-dire les pulsions incontrôlées de l'Ego. Le Maître des Cérémonie a le rôle difficile de donner une impulsion à ces éléments en équilibre, afin que par le mouvement toutes les forces présentes puissent accomplir leur fonction dans un ensemble harmonieux. C'est lui qui donne le rythme, qui constitue le guide accompagnant chacun et chaque cérémonie. Sa maîtrise du mouvement, sa courtoisie, son sens du temps, constituent aux yeux de l'Initié autant de manifestation de cette perfection qui est l'espérance maçonnique pour un monde meilleur. Tout est calme et contrôlé chez le Maître des Cérémonies, car il doit éloigner la colère, calmer les esprits et préparer chacun à la réalisation de l'égrégore commun. Il reste encore deux principes, ils concernent la sublimation de l'être, que les Anciens hermétistes appelaient Vertus Sublimales : la Sagesse et l'Intelligence. Elles sont le résultat de la sublimation de ces sept principes précédentes. En Loge ils sont représentés par l'Expert et l'Hospitalier. Le premier, par l'intégration des connaissances les plus profondes et hermétiques, acquiert la sagesse de l'esprit. Il connaît le grand dessein, ses symboles et les rituels magiques permettant aux initiés de s'y conformer. Pour cela il constitue le garde-fou du Vénérable Maître et son patrimoine. L'Hospitalier est le but de l'Initiation : l'Intelligence du cœur, celle qui seule sait nous guider à travers les épreuves de notre déterminisme. Les autre Officiers sont des compléments nécessaires au fonctionnement d'une Loge Maçonnique, mais ce qu'il faut retenir est que chaque rôle revêt son importance et est indispensable par son double sens : un côté administratif et extérieur, un côté ésotérique et caché. L'un est impossible sans l'autre. On ne peut pas accomplir ce qu'on ne connaît pas ou qu'on ne veut pas connaître, par paresse ou par incrédulité stupide, tout comme un raccourci simpliste empêche la démarche initiatique réelle. Alors laissez-moi terminer par une réflexion personnelle : si un homme veut être pompier pour l'uniforme ou pour avoir un gyrophare sur sa voiture, il faut prier beaucoup pour qu'il n'y aie jamais d'incendies ! J'ai dit Georges CARPINTIERI
Vous savez que j'attache toujours beaucoup d'importance aux relations existantes entre les symboles et la réalité, dont les premiers constituent une métaphore fondée sur un raisonnement. Le Temple maçonnique est aussi le Temple de la Raison, dans lequel on travaille à la recherche de la Vérité ; alors j'essaierai de traiter ce sujet en suivant un raisonnement qui puisse rendre hommage à la Vérité. Au point de vue astronomique les solstices correspondent aux points particuliers en lesquels l'axe de rotation de la Terre est le plus basculé vers le Soleil ou à son opposé. C'est alors que l'écart est maximal entre la durée du jour et celle de la nuit (à 45° de latitude nord, le jour le plus court est de 8h 40mn, et le jour le plus long de 15h 30mn). Dans l'hémisphère Nord, le solstice d'été a lieu le 21 juin et le solstice d'hiver le 21 ou 22 décembre. Au solstice d'été, par effet de son axe de rotation, la Terre offre donc, la plus grande portion de la surface du globe à l'ensoleillement diurne. Cela veut dire qu'à compter du lendemain du solstice, les jours deviennent plus courts et on quitte la lumière extérieure pour la garder à l'intérieur de nous-mêmes dans une période d'obscurité. C'est la loi des cycles, à la période de lumière suit toujours une période d'obscurité ; à la richesse suit toujours la pauvreté ; au pouvoir suit la traversée du désert. C'est la lame X du Tarot de Marseille : « la Roue de la Fortune », à laquelle fait suite « la Force » que nous devons être capables d'acquérir pour évoluer dans l'initiation et ne pas sombrer dans l'oubli et le mépris des hommes. Un initié qui n'est pas capable d'assumer son humble isolement, qui ne sait pas renoncer à l'apparat et aux honneurs n'est pas digne de découvrir les Trésor cachés de la Gnose, car il abuse des formes pour pervertir les contenus de l'Initiation. A ce propos Thomas disait dans le Logion 93 : « Ne donnez pas ce qui est saint aux chiens, de peur qu'ils ne le prennent pour du fumier. Ne jetez pas les perles aux porcs, de peur qu'ils n'en fassent de l'ordure. » N'oublions pas que Jean le Baptiste, en parlant du Christ, disait : « Il faut que Lui grandisse et que, moi, je décroisse » C'est l'impitoyable loi de la nature, qui en été offre tous ses fruits à l'extérieur, afin de garder dans ses entrailles la grande quantité de lumière et de chaleur solaire estivale, qui se transformera en ce feu intérieur, représenté par la salamandre des alchimistes, capable de déclencher l'évolution des éléments générateurs de la vie à venir. Si nous quittons le système de référence géocentrique, au profit de celui héliocentrique plus réel et non symbolique, nous nous apercevons que la Terre ne se trouve pas dans le signe du Cancer, habituellement considéré comme celui du solstice d'été, mais en Capricorne, c'est à dire celui de l'hiver. Autrement nous ne pourrions pas voir la constellation du Cancer. Or le Cancer symbolise la Vie, tandis que le Capricorne symbolise l'Homme. En réfléchissant quelques instants sur cette inversion, nous comprenons comme c'est indispensable de descendre dans la profondeur de nous-mêmes, dans notre isolement, dans notre Temple intérieur pour pouvoir regarder la Vie et tenter d'en dévoiler les secrets. Conscients de cela revenons à notre vie d'été éclairée par un soleil souvent aveuglant. Ces parfums, ces couleurs, les fruits juteux, le blé sont les conséquences du mystère du dédoublement de l'Unité primordiale, que nous saurons saisir par l'accroissement de notre état de conscience. La conscience, donc constituera l'ambiance dans laquelle on mesurera l'ampleur du mystère de la Vie. Le mystère sera visible, exotérique, à travers ses manifestations solaires : cette production abondante, cette récolte nourrissante qui permet à la Terre mère d'offrir sa création, avant de se renfermer en une nouvelle gestation. La Terre perd, alors sa connotation productive pour devenir l'élément propulseur du progrès évolutif des espèces : La Vierge Noire et son Enfant ; l'Isis de la régénération d'Osiris et de l'enfantement d'Horus. Tout cela ne se réalise pas par hasard mais par la capacité innée et acquise par l'être à faire « tourner la roue du moulin », à travailler avec modestie et persévérance dans l'amour pour l'art, qui par conséquent devient Art Royal. Ce type de travail, constant, infatigable, en profondeur et avec précision réalise l'homme et le met sur le chemin de son âme, en lui offrant la lampe, la lumière de laquelle éclairera la recherche de son Soi intime. C'est la lame IX du Tarot : l'Ermite qui cherche à connaître soi-même, car il peut voir la Vie en face. Néanmoins il devra faire toujours les comptes avec son déterminisme, avec son karma, avec les plans insondables du destin, afin de pouvoir s'y conformer en conscience et retrouver l'harmonie universelle, dans laquelle il n'y a plus d'opposition ni d'opposants, mais uniquement des composants de la Beauté de l'univers. Cette Vérité unique libère les êtres légers et aimants vers les plus hauts sommets de la connaissance et de la conscience, tout comme la colombe peut se transfigurer en aigle et déployer ses ailes vers le Soleil. L'œuvre sera ainsi accomplie et on verra naître la Raison comme les rayons d'un Soleil nouveau, auquel le principe vital puisera sa perpétuelle transformation. Dans le secret des entrailles profondes de la Terre, dans les bras de la Vierge Noire, au sein d'Isis, en traversant l'hiver obscur, l'initié saura trouver le sens de sa recherche et la force de ses choix. C'est ainsi qu'en diminuant, il pourra grandir ; c'est ainsi que le phénix renaîtra de ses cendres. A la porte d'été succédera la porte d'hiver, une face de Janus en offrira une autre. Le Solstice d'été annoncera le Solstice d'hiver. C'est l'espérance contenue dans ce jour particulier de l'année. Que ceux qui ont des oreilles entendent, que leurs yeux voient, que leur âme comprenne. J'ai dit Georges CARPINTIERI Que vient-il faire ce mot Alchimie
dans la Maçonnerie symbolique ?
Nous nous sommes engagés pour le triomphe de la Liberté, de
l’Egalité et de la Fraternité, et non pas pour dépoussiérer des vieilleries
telles que l’Alchimie. Nous avons, presqe tous, écrit un jour une planche sur le V\I\T\R\I\O\L\ ou sur la pierre occulte : La Pierre Philosophale. Ne sont-ils pas des concepts et des raisonnements alchimiques ? Le chemin initiatique doit nous conduire progressivement vers notre intériorité la plus profonde : ce Saint des Saints, dont ils parlent les anciennes traditions religieuses. Imaginez
cela comme un Temple mystérieux, dont l’accès est difficile ; comme est
difficile de cerner l’essence intime de toute chose. Il s’agît de trois sciences anciennes ; celles que pratiquaient les Mages Assiro-Babiloniens ou les prêtres de l’Antique Egypte. La Franc-Maçonnerie moderne a gardé la voie Alchimique, qui bien évidemment n’est pas la technique pour créer l’or. Qu’est-ce
que cette voie Alchimique ? Voici que
la Franc-Maçonnerie propose une voie très particulière : celle de la
transmutation des métaux en or. Mai
revenons à notre Initiation maçonnique. A propos de
ce stade du processus alchimique, P.V. Piobb dit : Seul reste l’esprit du profane. Cette partie immortelle en lui, enfuie dans la terre lors de la première des épreuves initiatiques, devra faire germer une nouvelle plante. La vie naît
de la putréfaction, du composte qui enrichi la terre, et qui est engendré par
l’action de l’eau vivifiante. Avec cet
acte de purification par l’eau, le 2° Surv A ce stade
du processus initiatique, le profane ne garde que ce qu’il y a de fixe en
lui, c’est-à-dire sa structure primordiale intime, dépouillée des formes
rajoutées par la vie matérielle dans le monde de son existence. Mais ce qui
est fixe est mort : le profane, n’est-il pas passé par la mort du
« vieil homme » ? N’a-t-il pas rédigé un testament
philosophique ? Maintenant le 1er Surveillant insufflera la vie sur ce
corps mort, sur ce fixe alchimique. Ainsi le néophyte mort à sa vie profane, reporté à sa nature
primordiale, après avoir reçu un souffle vivifiant, renaît en initié prêt à
rentrer dans l’Athanor : la Loge, où il sera chauffé par le feu de la
connaissance et de la Tradition, afin qu’il se produise en lui la
distillation des idées. L’Athanor était un vase clos renfermant l’être dans un
« bain-marie ». Sa fonction consistait à faire évaporer l’humidité,
qui montait le long des parois jusqu’au sommet, pour retomber sous la forme
de petites gouttelettes. C’est le sens de la quatrième et dernière épreuve : celle du feu. Par cette épreuve, le Vénérable Maître annonce au néophyte le chemin qu’il devra parcourir, afin de parvenir à la « conjonction alchimique » de ses aspects contraires et opposés. Afin d’acquérir la sagesse, qui est équilibre et harmonie. Par le feu on lui montre l’accès au Temple, mais il doit être conscient qu’il n’y rentrera qu’après avoir parcouru et vécu, dans son intimité, tout le chemin. Car, comme en Alchimie, en Initiation il n’y a pas de raccourcis possibles, ceux derniers étant uniquement des tromperies et des mensonges, racontés à soi-même, pour se donner l’illusion d’être différent de l’image réfléchie par le miroir. Nous avons passé rapidement en revue les quatre premières phases de l’Alchimie :
Lors de ces quatre stades du processus alchimique, on présente le Travail futur au néophyte et celui-ci s’y engage par serment, le serment étant symboliquement scellé par le sang. Mais un contrat a toujours deux parties contractantes : le Maître qui doit transmettre la Tradition Initiatique et le Néophyte qui doit la recevoir. La transmutation des métaux en Or ne se fait jamais seule, il faut un Alchimiste averti. Car dans les Sciences Secrètes aucune incompétence n’est admise ; les dégâts sont toujours irréparables, comme le dit bien Thomas : Si
l’aveugle conduit l’aveugle, La chute sera horrible surtout pour celui qui a conduit, car
il a agit contre sa conscience et comme le Vénérable Maître dit lors de la
fermeture des Travaux de Loge : « c’est par la Conscience que nous
sommes reliés au Divin ». Georges CARPINTIERI Le Rituel d’Initiation d’un profane est riche de références
aux Mythes, tout comme la Franc-Maçonnerie fait continuellement référence à
des Mythes : égyptiens, grecs, bibliques, chevaleresques. J’essaierai de donner une réponse à chaque question par l’analyse de la mythologie même. Pierre VINCENTI PIOBB écrivait, à propos de la
mythologie : La mythologie semble être différente et beaucoup plus
complexe qu’un simple ouvrage littéraire. Techniquement il faut faire une certaine différence entre un mythe, une légende et une fable. La distinction se situe au niveau du contenu, mais aussi sur la forme littéraire : la fable étant le récit le plus artistiquement conçu et le plus libre dans l’expression. Le
Mythe : le mythe peut être « constitutif »
ou « relatif ». Il est constitutif lorsqu’il parle d’un Dieu et
qu’il fondateur d’une religion. Il s’agira, donc, d’un mythe constitutif
fondamental. C’est celui qu’il faut aborder lorsqu’on veut étudier une
métaphysique. Par exemple le mythe de Vénus est constitutif, car il traite du
principe d’attraction universelle, à l’origine de notre vie sur cette planète
et une des forces fondamentales pour notre astrophysique. La religion de
Vénus a été une des plus importantes de l’antiquité gréco-romaine. Aux principes métaphysiques font suite les manifestations
philosophiques, qui, ayant un rapport avec la psychologie humaine, peuvent
(et souvent doivent) donner des directive éthiques. Or l’éthique est
étroitement dépendante des coutumes traditionnelles d’un lieu
géographiquement défini, d’un peuple. C’est le motif pour lequel parfois nous
sommes amenés à confondre mythologie et ethnologie ou tradition populaire. La
Légende : afin de détailler le mythe, les auteurs se
servaient des affabulations, plus au moins artistiques. Ces affabulations
prenaient la forme de légendes à caractère ethnique ou morale, en fonction de
leur finalité. La Franc-Maçonnerie, comme toute autre société initiatique,
bâtit sa structure éducative progressive autour d’un mythe fédérateur :
celui de l’homme droit axé sur sa conscience d’être matériel et spirituel,
masculin et féminin, humain et divin. Un homme sublimé après avoir été
putréfié, mort et ressuscité. Or comme les différents peuples définis
géographiquement avaient des mythes, des religions, des légendes et des
fables adaptés à leur culture et à leur histoire, ainsi le Franc-Maçonnerie
fait recours à des mythes interprétant des sensibilités particulières. On
appelle ceux-ci des Rites. Monsieur
(Madame), s’initier « c’est apprendre à mourir » dans le Monde
Antique ! La corde que vous portez dès cet instant au cou ne doit donc
point, à vos yeux, revêtir de caractère infamant, ni vexatoire. Il ne s’agit
point d’une inutile brimade. Cette corde symbolique n’est autre que l’image
du lien fluidique reliant votre forme subtile à l’enveloppe charnelle que la
Mort matérielle vous a fait abandonner. Quittant la Chambre de Réflexion et
son appareil funèbre, vous traversez, ainsi qu’en un mauvais rêve, le sombre Amenti, l’Hadès, le Royaume des morts. Guidé par
l’Hermès souterrain, conducteur des âmes dans l’Au-delà, vous vous dirigez en
aveugle vers la Lumière ineffable, et ce sous sa seule conduite. Que ceci
vous fasse pénétrer l’ésotérique enseignement de notre Rituélie : sans
nulle intervention providentielle, sans quelque occulte et mystérieuse
prédestination, il y a peu de chances pour que l’âme humaine, enténébrée,
retrouve le chemin de sa Liberté première. Tel est l’enseignement formel de
la Gnose... Nous
vous faisons toucher la terre, notre mère à tous, que l'antiquité a nommée Déméter ou Isis. Souvenons-nous que nous sommes
terre et que nous retournerons à la terre, n'oublions pas que la Vie et l'Amour sont une seule et même chose. Nos
ancêtres ont écrit « l'Amour
est plus fort que la Mort ». Georges CARPINTIERI Le 14 Octobre 1974 la R A propos de l’Athanor, nous trouvons la définition suivante
sur le Dictionnaire Mytho-hermétique de Dom Antoine-Joseph Pernety, la
meilleure référence dans ce domaine : Nous pouvons diviser cette définition en deux parties :
la première concernant l’aspect physique de cet appareil et la deuxième
inhérente à la métaphore, ou au symbolisme de l’athanor. Quelle est la forme d’un Temple ? Le processus alchimique est composé de sept phases différentes, au milieu desquelles on peut situer l’Athanor et son travail :
La Calcination, toujours selon Dom Pernéty, est ce processus
permettant l’évaporation de l’humide qui reliait les parties composants de
l’être : la forme ou l’intellect et la matière. Les Alchimistes
entendaient par là provoquer la mort du néophyte à son passé, à ses croyances,
à ses idées préconçues, afin de lui ouvrir d’autres horizons : ceux qui
l’auraient mis, un jour, en présence de la Lumière ineffable et éternelle. A ce propos Pierre Vincenti Piobb nous dit : C’est tout le processus initiatique qui est symbolisé par
l’Athanor, et ceci montre qu’il n’y a pas de séparation entre les diverses
sciences traditionnelles, surtout lorsqu’on veut faire de l’Initiation. Il semble donc que l’Athanor soit là pour permettre ce passage difficile. L’Athanor est aussi défini comme un « Vase clos», comme un alambic. Les Alchimistes disaient un « Vaisseau réchauffé par l’Athanor ». Or si un Vase est un Vaisseau et si un navire porte le même nom, c’est que les ésotéristes voulaient attirer notre attention sur cet ensemble d’étoiles de la constellation de la Vierge, dénommée aussi « constellation du Navire ». Zodiacalement ce signe de la Vierge est en face de celui des Poissons, symbolisant le mystère du changement de cycle, de la dualité qui ressort de l’Unité Première (le Verseau). Donc c’est bien dans le signe de la Vierge que la transmutation commence à s’effectuer par effet de l’Athanor. N’oublions pas que selon la tradition Compagnonnique le Vierge représente la Loge : encore une étrange relation entre nos pratiques et ces « vieilles traditions » ! Quant à l’Athanor, il a la forme d’une Tour. La tour
mythologique, comme celle d’airain dans laquelle fut enfermée Danaé par son
père Acrise, afin de l’empêcher de se marier parce que l’oracle lui avait
appris que son petit-fils le tuerait ; cependant Zeus, changé en pluie
d’or, pénétra par le toit de la tour et, ayant épousé Danaé, eut pour fils
Persée qui, plus tard devenu grand, tua par accident son grand-père Acrise. C’est de l’hermétisme qui permet les plus grands envols lyriques et le plus grandes rêveries à tous ceux qui ne veulent pas connaître. C’est une manière de protéger la tradition de la profanation. L’Athanor est en effet une Tour, une Tour Immortelle. Cette
construction mythique, légendaire et aussi historique. On la retrouve dans le
mythe de Danaé, dans la Bible avec la tour de Babel, dans les chansons
enfantines. Mais elle est aussi la dernière et tragique prison de Jacques
Molay et des derniers Templiers : la Tour du Temple à Paris. Elle a
marqué la fin des Capétiens, comme celle de l’ancien régime. Revenons encore une fois à la mythologie. Le mythe de Danaé indique que toute considération pratique
de cette philosophie très élevée – laquelle constitue un enseignement utile
pour l’évolution individuelle- doit s’envisager en raison de cet
enthousiasme, encore aujourd’hui dénommé « chaleur », dans un cadre
correspondant métaphoriquement à une tour.
Ce cadre a un caractère immortel, parce qu’il est toujours le
même à toute époque : l’Initiation. Comme conséquence –et par filiation de
cet enseignement- ce qui est purement théorique disparaîtra pour faire place
à des considérations pratiques : c’est le progrès de l’Humanité. N’est-ce pas le cycle de l’Initiation, le serpent qui se mord la queue, l’Ouroboros de notre Rite ? Séparer les éléments, décomposer la matière, distiller l’esprit essentiel des choses, les faire sublimer dans une nouvelle et retrouvée unité. « OMNIA AB UNO ET IN UNUM
OMNIA »,
soit : « Un
est en Tout et Tout dans Un !» Georges CARPINTIERI « Il
dressa les colonnes sur le devant du Temple, l’une à droite, l’autre à
gauche : il nomma celle de droite Jakin, et celle de gauche Boaz…» (Les
Chroniques, II – 3 – 17) Georges CARPINTIERI Le temps relatif de notre existence humaine est scandé par quatre phases du parcours apparent du Soleil : les deux équinoxes (printemps et automne) et les deux solstices (été et hiver). Sans ces quatre phénomènes astronomiques, la vie de l’homme sur terre serait certainement différente, car toute notre existence a été rythmée par cette cadence quaternaire. Nous pouvons supposer que l’homme primitif a observé, un jour, le mouvement apparent du Soleil : lever, zénith, coucher et que, par la suite, après un moment de frayeur pour la disparition de ce luminaire, il ait imaginé que l’astre de vie faisait un demi-tour dans un monde obscure, pour renaître au premier matin. Ces réflexions, accompagnées de l’observation des ombres, de longueur différente, sur le sol, ont pu être fixées par des marques sur le sable, par exemple. Alors une forme géométrique est vite apparue : le cercle reliant tous les points observés ou imaginés. La géométrie était née et, avec elle : la gestion du temps et de l’espace, par les rapports angulaires entre les points observés. Ce n’est pas de l’histoire, mais cette version des faits est certainement très proche de la réalité. Le cercle imaginaire, reproduisant le lever, le zénith, le coucher et le nadir du Soleil, est à l’origine de l’organisation spatiale et temporelle de la société ; mais il est aussi le fondement des mythologies et des croyances religieuses de l’homme. En effet le mouvement apparent du Soleil, qui a été décrit sur un cercle, suit les mêmes lois géométriques aussi bien sur un cycle de 24 heures que sur celui de 365 jours, soit 8760 heures. Nous pouvons encore symboliser, avec cette méthode, le cycle de vie de chaque être sur terre : naissance, âge mûr, mort, et…suite. L’homme découvrait ainsi la loi d’analogie et avec elle le raisonnement philosophique et initiatique. Il s’agit encore une fois d’une hypothèse d’étude, mais, de toute façon, l’Initiation Maçonnique (et même toutes les autres) s’y conforme. Nous voici, donc, dans une période astronomique qui correspond à une de ces quatre bornes de la pensée humaine : le solstice d’été. Je vous donne de suite une série de définitions se
rattachant à ce phénomène. ASTROLOGIE : ETYMOLOGIE
LATINE : Venons-en maintenant aux significations que ce phénomène assume dans les anciennes Sciences Sécrètes. ASTROLOGIE
INITIATIQUE : ALCHIMIE : MAGIE :
SYMBOLISME :
Un fil
conducteur commun relie toutes les interprétations de ce phénomène
astronomique qu’est le solstice d’été : la Vie et son Mystère. Or l’Initiation Maçonnique, et notamment le Rite de Memphis-Misraïm, qui est de nature vibratoire, fait recours à l’analogie alchimique de la putréfaction pour faire saisir toute l’importance de la Vie dans la profondeur de l’être. Cet énorme potentiel que chacun de nous possède et qu’il faut alimenter avec la chaleur et la lumière de la pensée philosophique, afin qu’il produise des fruits de toutes espèces. Mais la putréfaction appelle inévitablement la mort des formes successives. C’est le prix demandé par le progrès. Dans l’Initiation tout se passe ainsi : un mauvais apprenti donnera un mauvais maître ; des mauvais maîtres donneront une mauvaise initiation. Pour cela il y a des périodes où elle doit se replier sur sa nature intime, afin de se régénérer. Elle sera, donc, ésotérique, c’est-à-dire cachée, elle confiera la tradition à des élites chargées de la transmettre, et maintiendra sa philosophie à travers des transmissions symboliques concrétisées dans la matière. C’est le noble rôle des Compagnons bâtisseurs, que faire vivre l’Initiation par delà le temps. Mais comme
Homère le fait dire à Andromaque dans l’Iliade : C’est ainsi que Jean Baptiste dit, à propos de Jésus : « Il faut que je décroisse pour qu’il puisse grandir ». Un jour,
j’en suis sûr, la philosophie se joindra à l’action, les Francs-Maçons se
tiendront par la main avec les Compagnons, l’Initiation sera à nouveau
Exotérique et nous aurons traversé l’été éphémère des formes et des couleurs
pour découvrir la porte d’hiver : celle
de la Connaissance. Georges CARPINTIERI LA REGLE ET LA
CORDE A NOEUDS Tout d’abord, prêtons attention à ce mot d’Outil ; le Petit Robert donne la définition suivante : du latin Ustensilia. - Objet fabriqué qui sert à agir sur la matière, à faire un travail -. En effet, la Maçonnerie spéculative a emprunté aux
Compagnons maçons opératifs toute la panoplie d’outils de travail de la
construction ; ils portent encore aujourd’hui les mêmes noms et chacun
d’entre eux a une fonction et une utilisation précises, qui ne peuvent être
modifiées ou confondues, sous peine de le rendre inefficace, voir même
dangereux. Parmi tous ces outils, constamment sous nos yeux, il y en a
un pour lequel une certaine confusion ou ambiguïté s’est installée, au fil
des siècles : C’est la « Houppe Dentelée », improprement dite « Corde à Nœuds » qui, dans une interprétation beaucoup plus récente et teintée de romantisme, symbolise la Chaîne d’Union fraternelle reliant tous les Maçons de la terre. Or, la Houppe dentelée n’a rien à voir avec la Corde à Nœuds, aussi bien sur un plan symbolique que matériel et fonctionnel. Le véritable outil de travail est la « Corde d’arpenteur »
ou « Corde à 12
nœuds ». Cet angle se révèle particulièrement intéressant car il est
lié de manière intrinsèque à la Perpendiculaire. La géométrie Euclidienne, à
laquelle font référence les mathématiques, dit dans le 1er théorème d’Euclide
que : « sur
une droite, par un point donné, on peut tracer un nombre infini de droites,
mais une seule sera perpendiculaire ». La droite
perpendiculaire revêt donc un caractère d’unicité. Voyons un peu ! L’Homme est en pleine possession de tous ses moyens quand il est debout ; ils se trouve en équilibre stable quand il est, physiquement, à sa verticale (essayez, tout en gardant rigide l’axe de votre corps, de prendre une position inclinée par rapport au sol : vous verrez que cette position est intenable et entraîne inévitablement la chute!). De même, dans le processus de construction symbolique à
laquelle nous sommes appelés, en tant qu’initiés, ce sont les mêmes règles
qui sont utilisés, les mêmes lois qui agissent. Elles sont issues de
l’expérimentation ; elles sont vérifiables et reproductibles à l’infini,
car elles ont un caractère d’universalité ; elles sont donc « objectives »
et non issues d’une interprétation personnelle et subjective des choses. Il s’agît là d’un absolu philosophique. Cette ligne parfaitement droite et verticale reste un idéal, une direction donnée, une ligne de conduite ; mais dans la vie il n’existe pas de choix aussi tranchés, aussi nets et définitifs. Cela reviendrait à suivre des dogmes et à confondre l’esprit et la lettre. Certes, l’idéal serait de pouvoir marcher en équilibre parfait, tel un funambule, sur le fil du rasoir qui se dessine entre les cases noires et blanches du Pavé Mosaïque, mais…difficile d’avancer sans poser un pied à coté, tantôt sur le blanc, tantôt sur le noir. Et puis…même la corde du funambule a une certaine épaisseur !!! Tout cela pour dire que la Vie est faite d’avancements,
d’arrêts, parfois de pas en arrière…et puis ça repart ; aucun être ni
aucune chose n’est égale à une autre ; on trouve des similitudes, des
analogies. En somme la Vie est faite de rythmes (on parle bien de rythme de
vie !?), de rapports qu’on établit entre les êtres et les choses,
d’harmonie. Mais, d’abord, d’où vient cette idée d’harmonie ? La définition même du mot harmonie nous en délivre la
clés : (Petit Robert) Donc, la nature et la qualité des rapports que nous
établirons entre les différentes parties (personnes, objets, espaces
physiques ou situations) donnera, ou non, un ensemble harmonieux, composé
d’éléments différents, mais participant tous à une finalité collective. On appelle Nombre
d’Or ou Section
Dorée, un rapport particulier et constant, tel que, sur une
droite partagée un deux parties inégales, la plus petite partie est à la plus
grande, comme la plus grande est au tout. Ce rapport existe dans la nature et donne lieu à des proportions que nous ressentons, intuitivement et spontanément, comme belles et harmonieuses ; pourtant elles naissent d’éléments inégaux et différents. Maintenant, toute construction, réelle ou symbolique, doit
être définie par des dimensions précises, c'est-à-dire elle doit être
mesurée ; et pour mesurer nous avons besoin de la Règle. Or, les unités de mesure sont arbitraires et variables dans
les temps et l’espace ( voir la coudée, le pouce, le pied, le mètre, la
lieue, le mille, etc. ), c'est-à-dire qu’elles sont choisies en fonction de
l’usage que nous en faisons et du résultat que nous voulons obtenir. Quand on nous demande, en tant qu’Apprenti Maçon, quelles
sont les dimensions du Temple (aussi bien le Temple matériel dans lequel se
déroulent les Travaux que le Temple intérieur que nos devons édifier) on
répondra : « il va de l’Orient à l’Occident, du Midi au Septentrion et
du Zénith au Nadir ». Cela veut dire, peut-être, qu’on doit trouver tous seuls ; qu’il n’y a pas de valeurs fixes, utilisables partout et à l’infini, car cela reviendrait à établir un dogme et une pensée unique, totalement contraires à tout principe initiatique. Alors, avant de commencer notre entreprise, quelle qu’elle
soit, nous nous mettrons bien à la verticale à l’aide du fil à plomb et là,
en possession de toutes nos facultés, nous réfléchirons au contexte dans
lequel notre œuvre va se situer : lieu physique, époque, situation,
nature des matériaux, caractère et psychologie des personnes impliquées. Ce
sont tous ces paramètres particuliers et subjectifs qui nous permettrons de
définir la mesure la plus adaptée ; de choisir, en somme, « la juste mesure ». On s’aperçoit de la sorte que la Règle et la Corde à Nœuds
sont deux outils indissociables comme doivent l’être l’esprit et la lettre. Pour le Maçon la Règle signifie la régularité dans l’application des principes maçonniques à la vie courante, tant initiatique que profane. En Maçonnerie on trouve la Règle à 24 divisions. En effet, le nombre 24 est un nombre symbolique ; c'est-à-dire qu’il représente un polygone de 24 cotés ; or, la géométrie nous apprend qu’un polygone de 24 cotés correspond à l’application du Triangle sur les sommet d’un Octogone ; ce qui donne 3 x 8 = 24. Que veut dire cela du point de vue symbolique ? Par conséquent nous pouvons dire que entre deux aspects de l’espace physique se trouve un aspect psychique ; le psychisme ne pouvant pas être séparé du physique, dans l’être humain, tout comme le spirituel ne peut pas être séparé du matériel. Donc l’Octogone a cette particularité de signifier la complexité de l’être humain : un espace psycho-physique régi par l’esprit de l’être. Revenons, donc, à notre Règle à 24 divisions ; lorsque
nous voulons détailler l’espace d’un raisonnement appliqué à l’homme
physique, nous employons le Dodécagone ou polygone de 12 cotés. (Au passage
nous noterons que notre Corde à nœuds, déployée en cercle est divisée en
douze parties). Or la finalité ultime de la Franc-Maçonnerie est celle de construire l’Être dans toute sa complexité, aussi bien physique que psychique, afin que l’homme puisse s’élever de sa nature animale-physique à celle psychique et enfin pouvoir atteindre celle pneumatique (de l’esprit) : tel est le message caché de la Gnose. Pour conclure, donc, cette Règle à 24 divisions indique au Maître Maçon accompli, qu’il faudra saisir tous les différents aspects de l’Être avant de pouvoir transmettre quelque chose aux autres ; ça veut dire que nous pourrons entrevoir le chemin de l’homme dans le rapport entre les 24 idées-principes, distribuées géométriquement sur un cercle. En conclusion, rappelez-vous que la Corde à Nœudstracera les lignes directrices de notre Temple tandis que la beauté sera donnée par la juste mesure que nous auront su y appliquer. Milena CARPINTIERI-TUSA LE RITE ANCIEN ET PRIMITIF DE MEMPHIS-MISRAÏM, EGYPTOMANIE OU TRADITION EGYPTIENNE Sans doute avez-vous saisi, un jour ou l’autre, une bribe de conversation au cours de laquelle une interlocutrice ou un quidam explique d’un air pénétré qu’elle ou il est la réincarnation, au choix, d’une Grande Prêtresse égyptienne ou d’un Pharaon. De préférence Ramsès II – toujours coté à l’argus des gogos – ou Akhenaton - actuellement très tendance. En revanche, je n’ai jamais entendu quiconque revendiquer la réincarnation d’un palefrenier des écuries pharaoniennes ou d’un balayeur de temple à Karnak. On se demande bien pourquoi… L’égyptomanie se porte donc on ne peut mieux. Et fait
toujours fantasmer les amateurs de sensations fortes. Notre société basée sur
le marketing de masse décline l’Egypte antique sous formes de bijoux – en toc
– de statuettes made in China, de shampooing, voire de serviettes de bain et
même de bouquins plus ou moins mysticolâtres qui sont à l’ésotérisme ce que
McDonald’s est à la haute gastronomie. Néanmoins, la réalité nous contraint à prendre en compte
cette fascination égyptomaniaque. Non pour s’y arrêter trop longtemps mais
pour la relativiser et la dépasser. La civilisation égyptienne constitue une source essentielle pour les deux grands courants qui ont formé la pensée occidentale : le judéo-christianisme et la philosophie grecque. D’ailleurs, c’est essentiellement par leur truchement que nous connaissons la sagesse égyptienne. L’Egypte apparaît dans le Premier Testament dès la Genèse.
Abram (père élevé en hébreu) - qui ne s’appelle pas encore Abraham (père d’une
multitude) - et sa femme Saraï – qui ne se prénomme pas encore Sarah - se
rendent en Egypte, fuyant la famine qui sévit à Canaan. A la suite d’une
autre famine, Jacob – petit-fils d’Abraham –et sa tribu formant Israël se
réfugient à leur tour en Egypte afin d’y faire paître leurs troupeaux dans
les plaines fertiles du Nil. Les apports égyptiens à la pensée grecque se révèlent si nombreux que l’on doit se contenter de ne citer que quelques exemples. Prêtre d’Apollon à Delphes, l’écrivain grec Plutarque (de 125 à 50 avant J-C) a, comme tant d’autres penseurs, effectués son voyage en Egypte. Il a inspiré son célèbre ouvrage qui garnit encore nos bibliothèques : « Le Traité d’Isis et d’Osiris » où il met en lumière tout ce que la Grèce doit à la tradition égyptienne, notamment dans cet extrait : C’est
ce qu’attestent unanimement les plus sages d’entre les Grecs, Solon, Thalès,
Platon, Eudoxe, Pythagore et, d’après quelques-uns, Lycurgue lui-même, qui
voyagèrent en Egypte et y conférèrent avec les prêtres du pays. On dit
qu’Eudoxe fut instruit par Conuphis de Memphis, Solon par Sonchis de Saïs,
Pythagore par Enuphis l’Héliopolitain. Diogène Laërce – écrivain grec du IIIe siècle après J.-C. – a confirmé l’initiation égyptienne de Pythagore dans l’un de ses deux livres qui sont parvenus jusqu’à nous, à savoir « Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres » : Comme il était jeune et studieux, il (Pythagore) quitta sa patrie et fut initié à tous les mystères grecs et barbares. Il gagna donc l’Egypte quant Polycrate l’eût recommandé par lettre à Amasis. Et il apprit la langue du pays. Il alla aussi chez les Chaldéens et les mages. Etant en Crète, il descendit avec Epiménide dans l’antre de l’Ida. Tout comme en Egypte, il est allé dans les sanctuaires ; il y apprit les secrets concernant les dieux. Donc tous les grands penseurs grecs ont été fortement influencés par l’Egypte qui était pour eux la matrice de leur initiation aux mystères de la vie et de la mort. Platon l’atteste lui-même. Sans oublier Pythagore qui a créé son école– où les initiés avançaient par degrés successifs, comme en Franc-Maçonnerie – à Crotone en Calabre, afin de diffuser l’enseignement qu’il avait reçu en Egypte. Par opposition à elle, comme Moïse et son peuple. Ou en accord avec elle, comme les philosophes grecs, la civilisation égyptienne a donc permis aux deux grands courants de la pensée occidentale de creuser leur propre lit. Le courant juif inspirera le christianisme qui, ensuite, se propagera par le truchement de l’autorité de Rome. De son côté, le courant grec irriguera lui aussi les institutions romaines. L’initiation que Moïse a reçue en Egypte, à en croire les Actes des Apôtres, et que les philosophes grecs sont allés quérir au bord du Nil s’est vraisemblablement transmise par la Kabbale et les enseignements pythagoriciens. Il y a eu, bien entendu, moult brassages au cours des siècles et des influences réciproques. Il serait pour le moins hasardeux, voire fallacieux de prétendre que nous pratiquons aujourd’hui des rituels semblables à ceux de l’Egypte antique. Toutefois, on peut supposer – sur le registre de l’intime conviction et non pas de la preuve historiquement vérifiable – que l’influence spirituelle de l’initiation égyptienne a été transmise par le truchement des divers rites qui se sont succédé au cours des civilisations et dont, en fin de compte, la Franc-Maçonnerie moderne est la dépositaire. Ainsi, le puissant mythe d’Isis et d’Osiris nous émeut aujourd’hui encore. Il est demeuré intact à travers les millénaires, ce qui démontre bien qu’il recèle, en lui, une force que d’autres écrits oubliés depuis ne possèdent pas. Il constitue l’un de ces archétypes qui modèlent nos divers états de conscience, dont ce que l’on nomme - improprement selon moi – l’inconscient. L’influence la plus directe de l’Egypte sur la
Franc-Maçonnerie prend sans doute sa source dans l’ère des Ptolémée, ces
souverains gréco-macédoniens qui ont régné sur l’Egypte après la mort
d’Alexandre le Grand, de 305 avant à 30 après Jésus-Christ. Et au sein de
l’Egypte ptolémaïque, c’est Alexandrie qui fut la cité-creuset de
l’ésotérisme en Europe et au Proche-Orient. La tradition égyptienne, via la Grèce, se retrouve également dans la Franc-Maçonnerie opérative qui a fidèlement suivi les enseignements pythagoriciens pour bâtir ses cathédrales. Une trace écrite de ce tribut des Frères opératifs à l’Egypte antique figure dans le Manuscrit Regius rédigé en Angleterre en 1390 et qui retrace l’histoire de la Maçonnerie. Voici le passage en question du Regius : De cette manière, par la bonne science, commença le métier de la Maçonnerie. Le clerc Euclide le fonda ainsi, ce métier de géométrie, au pays d’Egypte. En Egypte, il l’enseigna tout autour, dans divers pays, de tous côtés. Rappelons qu’Euclide était un géomètre grec qui enseignait à Alexandrie sous le règne de Ptolémée 1er (323-283 avant Jésus-Christ. Il fut le créateur de la géométrie plane, dite euclidienne. Comme Abram et Jacob menant leurs troupeaux paître au bord du Nil fertile, comme Joseph et Marie s’y réfugiant pour sauver l’enfant Jésus des persécutions d’Hérode, l’Occident retourne donc aux sources égyptiennes lorsque la nécessité s’en fait sentir. C’est à l’un de ces retours vers l’Egypte que nous devons, au moins en partie, la création de certains rites égyptiens au sein de la Franc-maçonnerie moderne, à savoir la campagne de Bonaparte sous les pyramides. Toutefois, avant cette expédition, la Franc-Maçonnerie a toujours été attirée – le plus normalement du monde – vers la Mère des Initiations. Le plus célèbre témoignage de cet intérêt nous est offert par le F. : Mozart qui a créé sa « Flûte enchantée » - d’inspiration ô combien égyptienne - en 1791, soit sept ans avant la campagne du général Bonaparte. L’envie d’Egypte était donc bien ancrée au sein de la
Franc-Maçonnerie moderne alors en plein essor. D’autant plus que les premiers
rites égyptiens ont été créés dès le début de la transformation de la
maçonnerie opérative en maçonnerie spéculative, soit en 1721 – deux avant la
publication des Constitutions d’Anderson – pour le Rite Primitif de Paris et
1779 pour le Rite Primitif de Narbonne. Notons en passant que la Grande Loge
de Savoie possède les patentes régulièrement transmises de ces deux rites. Ce Rite s’est perpétué jusqu’à nous malgré des séries de scissions en tous genres, fruits vénéneux de la vanité humaine. L’important est que ce réceptacle des anciennes sagesses perdure. Il fait pleinement partie de la Franc-Maçonnerie au même titre que les autres Rites. Mais il lui ajoute des éléments essentiels, dont le rappel à notre mémoire des mythes égyptiens fondateurs de l’Occident et la transmission de la sagesse hermétique. Jadis comme naguère, aujourd’hui comme demain, Isis et Osiris proclament le triomphe de la vie sur la mort, de l’amour sur la haine. Ils dansent avec la mort pour mieux l’ensorceler. Ils dansent éternellement pour réunir ce qui est épars. Jean-Noël Cuénod analyse rationnelle d’une donnée spirituelle « Ici sont
les Arcanes de la Gnose, que ceux qui ont des oreilles entendent, que leurs
yeux voient et que leur âme comprenne » (Rite Ancien et Primitif
de Memphis-Misraïm) « La science
est un coffre dont la clef est le questionnement » (Al-Darimî et
Ahmad B. Hanbal) « Jésus
disait : Les pharisiens et
les scribes ont reçu les clefs de la connaissance et ils les ont cachées. Ils
ne sont pas entrés à l’intérieur, et ceux qui veulent entrer, ils les
empêchent. Vous, soyez attentifs comme le serpent et simples comme la
colombe. » (Thomas
– Logion 39) Il s’agit, ici, de
trois exemples du rapport entre la Connaissance, l’Arcane et la Clef, issus
de trois cultures différentes : l’Initiation Maçonnique, le monde
Islamique, le Gnosticisme Chrétien. Je pourrais en citer bien d’autres
encore, mais ce n’est pas l’objet de cette Tenue. Revenons au Rituel
d’Ouverture des Travaux. Le V\M\ dit : « Ici
sont les Arcanes de la Gnose… » Il est, donc,
indispensable de se questionner sur l’objet des Arcanes, afin de comprendre
notre Rite et de découvrir si nous y sommes en syntonie ; à savoir si
notre démarche est cohérente avec son esprit et ce qu’il véhicule. Il ne faut pas
oublier que le plus haut degré du Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm
est constitué des Arcana Arcanorum, c’est-à-dire les Secrets des Secrets. M’ayant demandé
d’être pédagogique, j’essaierai de structurer mon discours par petits
paliers ; ensuite je les relierai et j’en tirerai ma synthèse. Néanmoins, afin de
bien nous entendre, je vous donnerai les étymologies des mots employés. La Clef – L’Arcane
– Le Pouvoir – Le Savoir – La Fraternité – L’Initiation La
clef : Ce qui sert à
ouvrir. Instrument de métal servant à faire fonctionner le mécanisme d’une
serrure. Ce qui donne accès. Ce qui explique, qui permet de comprendre. En
architecture : la clef de voûte, pierre en forme de coin placée à la
partie centrale d’une voûte et servant à maintenir en équilibre les autres
pierres. L’Arcane : Secret. Préparation
mystérieuse réservée aux adeptes. Du latin « arcanum » secret,
chose occulte. Le
Pouvoir : Le fait de pouvoir, de disposer
de moyens naturels ou occasionnels qui permettent une action. Faculté,
possibilité, don. Possibilité d’agir sur quelque chose. Propriété physique
d’une substance placée dans des conditions déterminées. Le
Savoir : Ensemble de
connaissances plus ou moins systématisées, acquises par une activité mentale
suivie. En philosophie : état de l’esprit qui sait ; relation entre
le sujet et l’objet de pensée dont il admet la vérité (pour des raisons
intellectuelles et communicables). La
Fraternité : Lien existant entre les
hommes considérés comme membres de la famille humaine ; sentiment
profond de ce lien. Lien particulier établissant des rapports fraternels. L’Initiation : Action d’initier.
Admission aux mystères. Introduction à la connaissance de choses secrètes,
cachées, difficiles. Action de donner ou de recevoir les premiers éléments
d’une science, d’un art… Nous allons, donc,
analyser comment l’Initiation dans une Fraternité peut, en fonction d’un
Savoir, nous donner la possibilité d’agir en direction de la découverte d’un
Grand Secret. Lorsque nous avons
été initiés, tous avec la même procédure, nous avons prêté serment sur trois
outils l’équerre, le compas et la règle. Et le V\M\ nous a dit :
« En cela que le Suprême Architecte de tous les Mondes me soit en
aide, et les Vivants Symboles que je touche de ma main » Soit les présents
étaient totalement ivres, soit ils voulaient se moquer de nous, soit ils
voulaient nous suggérer, avec ces symboles, quelque chose. Je vous rassure
tout de suite : la troisième hypothèse est la bonne ! Mais alors, c’est
que ces outils doivent être employés pour comprendre ce que nous devons
faire… si c’est vrai, il n’y a qu’une science qui les emploie : la
géométrie. Le théorème initiatique est logiquement démontré. Tous les Maîtres F\M\ vous diront, en
gonflant leurs poitrines comme tout coq qui se respecte : « Mon
Frère Apprentis, souviens-toi que sur le fronton du Temple de Pythagore était
écrit : que nul n’entre ici s’il n’est pas géomètre ; mais que nul
n’entre ici, s’il n’est que géomètre ! » Et à l’Apprenti qui
demandera des explications de cette phrase, les mêmes Maîtres
répondront : « Ce n’est pas à ton grade…et puis je ne suis pas
vraiment matheux… Mais enfin, la F\M\ est spirituelle
et la géométrie s’intéresse au domaine matériel… ! » Quelle confusion
et quel gâchis pour les intelligences… ! Voici, donc,
qu’aujourd’hui, fête solsticiale d’hiver, c’est-à-dire, jour où la Lumière
commence à faire son travail intérieur, partout dans la nature et par extension
dans les hommes, je vais essayer de vous parler de Spiritualité en employant
une méthode rationnelle ; à ceux qui voudront me juger comme un
incorrigible intellectuel, je répondrai en les remerciant pour le compliment,
car j’ai œuvré toute ma vie pour être intellectuel. Ainsi je pourrai être
cohérent avec mon engagement maçonnique, c’est-à-dire : travailler à
l’amélioration intellectuelle et spirituelle de l’individu… \ Conformément aux
paroles de Pythagore, j’attribuerai 12 idées aux 12 sommets d’un dodécagone,
que je connoterai zodiacalement afin de fixer les caractéristiques
principales de chaque idée. Mais pour rendre
plus compréhensible mon procédé, j’avancerai progressivement en regroupant
ces idées par relations de mobile et de conséquence. Reprenons encore
une fois notre Rituel d’Ouverture des Travaux et notamment le passage où le V\M\ s’adresse au 2ème
Surv\ pour que lui dise
quels sont les nombres mystérieux. Ce dernier lui répond : « Les
nombres trois, cinq et sept… » Nous devons pouvoir
utiliser cette indication fournie par le 2ème Surv\, si, comme je
crois, le Rituel n’est pas fin à soi-même. Je commencerai par
le nombre trois. Ce nombre est
figuratif, c’est-à-dire qu’il représente un polygone de trois côtés et
notamment un triangle équilatéral. Nos Apprentis savent que cette figure
symbolise le passé, le présent et le futur ou encore le mobile d’un fait, le
fait même et sa conséquence. Selon le titre de
mon travail, le fait est la Clef, sa conséquence est la découverte du Grand Arcane,
puisqu’elle permet d’y accéder ; le mobile est l’Initiation, le désir de
connaître, vivant en chacun de nous, qui nous confère ou non les qualités et
l’envie nécessaires pour entreprendre un chemin vers la connaissance des
Mystères. Je situerai, donc, sur ce premier triangle : l’Initiation, la
Clef, le Grand Arcane. Ces trois idées
constituent, en quelque sorte, le moteur agissant de mon étude. En réalité la
Clef permet l’action de découverte, tout comme le Grand Arcane protège ce
savoir secret, qu’est la Tradition Initiatique. Enfin l’Initiation constitue
ce moteur pouvant nous conduire sur le chemin de la découverte de nous-mêmes
et de l’Homme. L’Initiation et sa méthode particulière, par paliers
successifs, offrent les capacités d’action de chacun. Je considère que ce
triangle a le caractère du feu : un feu intérieur, bien évidemment. Ce
feu chauffe l’Athanor de chacun de nous, afin qu’il en sorte la quintessence
et que l’Humanité puisse ainsi progresser, selon la formule d’ouverture des
travaux prononcée par le V\M\ La physique
enseigne qu’une action quelconque, pour se manifester, doit comporter une
force appliquée à une masse. En philosophie on dit qu’il faut donner concrètude
à une pensée. Pour donner concrètude il faut une ambiance matérielle dans
laquelle notre pensée puisse se manifester. Que cette ambiance soit physique,
psychique, métaphysique, utopique…peu importe. Voyons alors
l’ambiance dans laquelle la clef va agir et actionner la serrure du Grand
Arcane. Nous travaillerons
toujours sur un triangle. Cette fois les sommets seront connotés par les
idées suivantes : le Mystère, la Fraternité, le Divin ou le
Déterminisme. Le Mystère est
tout naturellement l’ambiance, le milieu dans lequel l’Arcane trouve sa place
et la Clef produit son action. Ne parlons-nous pas des Grands et des Petits
Mystères en F\M\ ? Et notre Rituel, ne
crée-t-il pas une atmosphère mystérieuse ? Le mystère n’est
pas l’étrange, mais ce qui est normalement inconnu, car réservé aux initiés
(du grec mustérion, mustés), mais par extension ce mot veut
dire : ce qui est caché. Or les mystères initiatiques sont provoqués par
le fait que nous nous intéressons à la nature intime de la création ;
donc le mystère est engendré par le Divin ou mieux par le déterminisme de
chacun, qui confère ou non les qualités pour être initié. C’est un puissant
moteur que cet inconnaissable, auquel l’homme attribue le pouvoir de
structurer la création et, par conséquent, nos capacités à le saisir en
dehors des imageries ou des projections subjectives. Ces dernières ne peuvent
que transformer l’inconnaissable en Divinité. C’est le
« souffle », dont parlent les textes sacrés de chaque religion et
de chaque culture. Or le souffle est impalpable, par définition même ;
comment lui donner forme et image sans le pervertir ? Nous sommes en
dehors du définissable, c’est pourquoi toute définition du divin amène
impitoyablement au dogme et à l’affirmation sectaire. Alors il ne nous reste
que le mystère, c’est-à-dire une ambiance permettant d’éveiller les
consciences, car par les consciences nous sommes reliés au divin. S’il y a
action de relier, c’est que nous ne sommes plus seuls dans cette recherche…Le
mystère a, donc, engendré la Fraternité. Dans la recherche du Divin, nous
quittons la subjectivité pour vivre pleinement une relation à l’objet du
mystère. Dans cette relation, nos particularités deviennent autant de
révélateurs de l’immense mécanisme de la création. Tout initié farouchement
ancré dans sa subjectivité n’est pas capable d’aimer et, donc, d’être
frère ; car ce qu’il croit être de l’amour n’est que de
l’auto-satisfaction ; un peu comme le plaisir qu’éprouve un enfant
boulimique devant une vitrine de bonbons. Lorsqu’on reste
des individualistes butés, on ne peut pas s’ouvrir à la compréhension du
monde et des hommes, car nos métaux sont restés dans nos poches et…oh,
combien ils pèsent !… Ce triangle
équilibre le premier et plus le mystère est grand, plus la clef doit être
complexe. Il s’agit d’un triangle d’air, car évidemment nous sommes dans
l’ambiance de l’éther. Jusqu’ici j’ai
traité des éléments délimitant l’action de la Clef sur l’Arcane et l’ambiance
de cette action. Mais en quoi se concrétise-t-elle et comment ? Il nous reste à
examiner deux autres triangles. L’un représente la matérialisation de la Clef
sur l’Arcane. Je poserai sur ses
sommets les trois idées suivantes : le Savoir caché, qui pour moi est la
Vie même et l’enseignement qu’elle offre à long et à court terme ; la
Fin, voir la mort ou l’achèvement d’un cycle. La Renaissance ou le début d’un
nouveau cycle. Ce triangle sera connoté par l’élément Eau ; l’élément
dans lequel naît la Vie en tant que réalisation concrète et matérielle. La
Genèse biblique l’explique, lorsqu’elle parle de la séparation des eaux
préliminaire à la création. Mais encore, le fœtus, n’est-il pas plongé dans
les eaux ? Regardons de plus
près les trois idées ci-dessus. C’est évident que
quand on veut découvrir un Arcane il faut connaître son secret, donc il faut
acquérir un « savoir caché ». Quand cet Arcane est le Grand Arcane,
lié, comme nous avons vu au Divin, ce Savoir ne peut qu’être le
« Mystère de la Vie » celle avec un grand V. Tout Savoir (à
ne pas confondre avec l’érudition) est le fruit d’une confrontation entre une
théorie et sa pratique. Nul ne peut affirmer connaître quelque chose pour la
simple raison de l’avoir lue sur un livre ! Mais nul ne peut dire de
connaître pour avoir expérimenté un aspect de cette même chose, selon sa
propre sensibilité subjective. Le fait d’avoir
tout lu sur la Vie et ses prétendus mystères, ne veut pas dire forcement que
nous savons vivre. Par ailleurs, notre expérience de vie ne peut pas être
généralisée comme étant la Vie absolue et, donc, nous ne pouvons pas la
transmettre à autrui sous peine de pêcher de prétention. Ce Savoir caché,
dont je parle, est le résultat d’une profonde méditation sur le passé proche
et lointain de l’Humanité. Un passé qui nous parle d’expériences vécues, des
joies, des douleurs, de ceux qui nous ont précédé et ont ainsi façonné notre
présent. Tout comme nous le ferons pour le futur de nos enfants. Cette
connaissance, que je définirai comme théorique, est confrontée à notre
sensibilité personnelle. Cette sensibilité nous guidera vers la découverte du
sens que notre esprit a bien voulu donner à notre réalité matérielle. Or je
considère que le mobile nous permettant d’enclencher ce travail sensible est
la mort. Lorsque nous sommes confrontés à la Mort, nous nous questionnons sur
la Vie. Celle-ci quitte alors notre confort douillet, fait de travail pour
gagner toujours plus, d’ambitions personnelles, d’alimentation quotidienne,
de relations fugaces et superficielles, de manipulations politiques,
d’illusions de tous genres, pour se recentrer sur la question
fondamentale : « D’où je viens, où je vais ? » Deux réponses
s’offrent à notre intelligence : celle toute faite et bien cadré par le
dogme religieux ; celle du doute permanent et de l’envie de recherche.
Entre les deux il y a l’insouciance et le vide intellectuel. Les réponses que
nous saurons nous donner nous amènerons, tout doucement et progressivement
vers des horizons très larges, où l’inconnu ne fera plus peur, mais il nous
invitera à d’autres et plus riches expériences de Vie. C’est la Renaissance
de chacun, le renouvellement de notre Etre profond. Voici pourquoi nos
Rituels sont des Rituels de mort. Il ne s’agit pas de jouer une scène, afin
de faire peur à l’impétrant ; il s’agit de lui proposer de s’engager sur
la voie de sa renaissance. N’oublions pas ce passage fondamental du Rituel
d’Initiation, peut-être le plus important pour un profane : -
Monsieur (Madame), s’initier « c’est apprendre à
mourir » - Il nous reste
enfin le dernier triangle, celui de la terre, l’élément matériel et solide de
la création. Sur ce triangle on
trouvera : le Pouvoir, le Temple Intérieur et le Travail sur soi-même. Qui a le pouvoir
d’actionner cette fameuse Clef ? Nous même, notre Etre. Ce pouvoir est
directement proportionnel au niveau de notre conscience. Cette Conscience,
que les sociétés initiatique dénomment : le Temple Intérieur, est le
moteur de ce Pouvoir ; car un Etre ayant
comme seules impulsions de sa conscience : manger, dormir et
coïter, jouira certainement des plaisirs et des passions de l’existence, mais
il maîtrisera bien peu de choses cachées. Or l’Etre se
construit entre deux tuteurs : son déterminisme et son désir de
connaître. Quand le désir de connaître est authentique, que l’homme ne se
contente plus d’affirmer aveuglement des « on dit », qu’il refuse
aussi de devenir le « Beni oui, oui » des Eglises ou des partis
politiques, alors l’Initiation s’ouvre à lui. Ainsi sa conscience le guidera
vers le travail le plus difficile et, souvent, le plus douloureux : le
Travail sur soi-même. Il lui faudra persévérer dans la lutte contre ses idées
préconçues, contre ses acquis, contre son passé : c’est le djiad des
musulmans. Mais le résultat de ce Travail sera la découverte du Grand
Arcane : cette parcelle de divin présente en chacun de nous. \ Je pourrai
m’arrêter ici, mais je vous ai promis une synthèse. Je me dois, donc, de vous
la livrer. Une fraternité
authentique est une force d’échange en conscience, qui révèle une pensée
philosophique orientée vers l’amour. Un amour qui est compréhension d’autrui
et non sensiblerie fallacieuse. Cette philosophie est caractéristique de la
voie Initiatique. Cette voie pousse
à la mise au point des clés de compréhension des secrets de l’humanité. Ceux
qui sont dans le Saint des Saints de l’Initiation même : les Arcanes.
Pour qu’un Arcane soit Grand, il faut qu’il regarde ce qu’il y a
d’inconnaissable pour l’esprit humain. Autrement il s’agirait du
« secret de Pulcinella », que tout le monde connaissait ! Cet Inconnaissable
engendre une ambiance mystérieuse, souvent simulée par des cérémonies, dites
Grands ou Petit Mystères. En effets, l’homme, dans son désir de comprendre et
d’expliquer, crée des divinités, des mythes et des légendes lui permettant
d’approcher l’Arcane par analogie et employant ainsi le symbolisme. Le Mystère, ou les
Mystères, s’enrichit du passage d’un stade à l’autre de la Vie ; car le
choc produit par la disparition de l’être matériel, invite à réfléchir sur le
sens même de l’existence et de la création. Ainsi un Savoir particulier prend
consistance et amène l’être humain à casser sa carapace intellectuelle et
matérielle. La cassure se recompose en une conscience plus élevée, déjà par
la simple prise en compte des ces nouvelles expériences. L’homme, se
distinguant de l’animal, pour son niveau de conscience, devient enfin un être
capable de saisir, même partiellement, le sens de la Vie, qu’il n’assimilera
plus à l’existence matérielle. Là le Travail commence et l’Initié peut se
considérer comme tel réellement. \ Mes Sœurs et mes
Frères Bien Aimés, ne prenez pas ce que je vous ai dit pour une
« révélation », je n’en suis pas capable. Il s’agit d’un
raisonnement sur des expériences vécues dans ma chair et sur des réflexions
éveillées par des Sœurs et des Frères qui me sont chers. Certains ne sont
plus, mais ils continuent de vivre dans mes pensées. Chacun a un Grand
Arcane à découvrir ; qu’il sache que personne ne l’oblige à le faire,
mais l’aventure est belle et ça vaut la peine d’être vécue. A ceux et celles
qui ont hâte de monter en grades et qualités, je dis seulement que, au prix
de les décevoir, je n’ai dévoilé rien de secret et d’ésotérique. Je n’ai pas
parlé non plus d’un symbole présent dans un des degrés supérieurs :
cette clef n’a pas la même signification. La voie de la connaissance se
parcourt par étapes progressives ; les embûches sont tellement
insoupçonnables qu’il faut être prêt aux pires difficultés. Je n’ai fait que
vous parler de vos épreuves initiatiques, à travers la Terre (la matière),
l’Eau (vos créations), l’Air (votre déterminisme), le Feu (ce que vous voulez
faire). Pour cela je vous ai montré comment se servir d’un Maillet, d’un
Ciseau et d’un bon Levier. Je termine ce
travail par deux cadeaux, que j’ai le plaisir de vous offrir : 1. Le polygone
m’ayant permis de travailler est un 60 côtés. Comment l’utilise-t-on ?
Je vous laisse le soin de l’étudier, car « Que nul n’entre ici s’il
n’est pas Géomètre ! » (En annexe) 2. Le Logion 2 de
Thomas : Jésus
disait : Que celui qui
cherche soit toujours en
quête jusqu’à ce qu’il
trouve et quand il aura
trouvé, il sera dans le
trouble, ayant été troublé,
il s’émerveillera, il régnera sur le
Tout. Georges
E.Th. CARPINTIERI L’INITIATION
EST-ELLE UNE FIN EN SOI ? L’Initiation
est-elle une fin en soi ? Être
une fin en soi, ça veut dire n’avoir de but que pour sa propre glorification.
Or l’Initiation quelle qu’elle soit, a toujours une finalité ; même si
parfois cette finalité reste occulte ou occultée. L’Initiation
maçonnique est considérée comme la voie initiatique occidentale. En effet elle
se donne comme finalité « l’amélioration matérielle et spirituelle de
l’humanité. L’humanité qu’elle veut conduire sur une voie progressive d’un
progrès toujours plus dynamique. Mais
regardons de plus près les modalités de l’Initiation des Francs-Maçons. On
commence par le Cabinet de Réflexion ; une sorte d’invitation à
l’introspection de l’être ; un retour dans l’état fœtal, mais en même
temps un appel de la Mort et un commencement de la putréfaction de la
matière. Pourquoi
ces deux références : la première constituant la naissance de la Vie et
la deuxième évoquant la Mort ? Car l’homme qui veut être initié doit
d’abord comprendre que le cycle vital n’est qu’un éternel retour de la Roue
de l’existence. La vie ne peut être appréhendée qu’après avoir été confrontée
à la mort. Quitter
les métaux signifie abandonner tout ce qui peut nous attacher à la matière,
donc mourir à nos habitudes profanes, à nos acquis intellectuels, à nos
passions et émotions. Ainsi l’être se retrouve face à l’esprit ; cette
quintessence que les alchimistes poursuivaient dans leur recherche de la
pierre philosophale. Visita Interiora Terrae Rectificandoque Invenies
Occultum Lapidem, formule antique qui donnait V\I\T\R\I\O\L\ Le
néophyte doit donc descendre dans les entrailles de sa personne pour
découvrir le sens profond de son existence. C’est la seule possibilité qui
lui reste pour retrouver la force nécessaire pour affronter les épreuves
initiatiques. Bien
évidemment ces épreuves sont symboliques, mais non pas vides de sens et de
répercussions sur sa psyché, comme disait C. JUNG. Vue
sous cet angle l’Initiation Maçonnique est très proche de celle vécue d’antan
par les Compagnons bâtisseurs des cathédrales. Ils vivaient en communauté,
ils avaient tout abandonné pour se dédier uniquement à leur art et à leur
métier. Non qu’ils fussent des moines mystiques, mais pour se nourrir
pleinement du sens profond caché dans les règles de l’art. En construisant,
ils s’exprimaient tout en transmettant un message initiatique venant du fond des
ages. Ce même message qui forgea le patrimoine de l’Occident et guida la
culture des peuples. Par
analogie avec ces prédécesseurs opératifs, la Franc-Maçonnerie demande
d’abandonner nos acquis, afin de nous faire plonger dans ce vaste océan
qu’est l’éthique maçonnique : liberté, égalité et fraternité.
Pouvons-nous appréhender pleinement le sens de ces principes en restant
derrière le voile de nos idées bien faites et incrusté dans nos soucis
quotidiens ? Non,
il faut faire d’abord le vide ; il faut prendre une grande respiration,
celle permise par le silence de l’Apprenti, afin de pouvoir partir avec
fraîcheur à la recherche de notre être parmi les autres. Suit
un chemin long, nécessitant beaucoup de patience et de persévérance, car la
reconstruction est toujours plus difficile que la décomposition. Chaque
profane accepte de « quitter » ses métaux, de se plier aux
exigences des Maîtres lui transmettant une tradition. Mais combien sont
capable de se construire à « la verticale » de leur quintessence,
assumant avec cohérence et honnêteté la signification symbolique des outils
des bâtisseurs ou des éléments astronomiques présents dans un Temple ? Trop
souvent l’Initiation Maçonnique est ressentie comme un moment de
loisir ; un loisir intellectuel, c’est vrai, mais toujours un moment de
détente agrémenté par la présence chaleureuse des amis (les Frères) et d’une
bonne bouteille de rouge… L’Initiation
Maçonnique bien vécue doit changer l’esprit de chacun ; elle doit lui
donner le sens de la honte pour chaque action non droite, comme le fil à
plomb. Doit lui donner la rigueur dans le travail ; le plaisir de faire
par soi-même et dans l’excellence. Mais l’Initiation fait aussi découvrir que
les hommes et les femmes peuvent être des frères et des sœurs, que cela
implique des engagements pour la vie, si l’on veut toujours soutenir le
regard devant un miroir. Les peines des autres seront nos peines, et les
joies pourront ainsi être partagées. Dans
ce sens l’Initiation prépare à la Vie. Une Vie rayonnante, dans laquelle les
petites actions ont l’importance des grandes et l’orgueil est banni au profit
de la conscience de sa propre valeur. Cette
construction nous fera sentir libres par le travail, car nous travaillerons
sans rémunération pécuniaire, pour le seul plaisir de la perfection
recherché. Nous serons aussi les égaux des autres frères appelés aux mêmes
taches que nous, mais avec d’autres difficultés ; c’est ainsi que nous
aurons la perception concrète de la fraternité, de cet ensemble d’hommes
appelés à la plus grande tache que l’on puisse imaginer : celle de la
construction d’une humanité meilleure. Observer,
réfléchir, se taire, œuvrer sous le guide de la sagesse, pour créer avec
force une beauté universelle. Seulement
ainsi le Maître pourra être reconnu comme tel et vivre pour l’éternité. C’est
celle-ci, peut-être la seule et éternelle finalité de la Franc-Maçonnerie.
Une finalité qui ne donne aucune récompense immédiate, ni des fruits que l’on
puisse cueillir à la prochaine saison…Ces fruits seront cueillis par nos
enfants, si nous sommes restés fidèles à nos engagements, comme le furent les
Frères qui nous précédèrent depuis des siècles. Lorsque
la Maçonnerie se prête au jeu des affaires, à la complaisance intellectuelle,
à la faiblesse d’esprit, elle ne forge plus comme Tubalkain des hommes
droits, mais devient une fin en soi ; c’est-à-dire une « machine à
perversion », une secte ignoble, comme ignoble est l’être qui exige sans
mériter, comme ignobles ont été les trois mauvais Compagnons qui
assassinèrent Maître Hiram, symbole archétypal de ce chemin ardu, constitué
par la démarche initiatique. Comprendre
alors que tout un enseignement traditionnel, transmis par la F\M\, n’est pas un
ensemble de « vieilleries » désuètes, mais un moteur d’évolution
parmi les plus puissants en Occident, est encore le signe que l’Initiation a
une fin beaucoup plus importante qu’on ne croie, une fin en dehors du temps
et de l’espace capable de faire évoluer l’humanité depuis la nuit des temps. A
ceux qui pensent que tout cela est inutile, je paraphraserai Socrate :
« C’est déjà un savoir, que de savoir qu’on ne sait rien ». Georges CARPINTIERI RAISONNABLEMENT
SPIRITUEL, SPIRITUELLEMENT RAISONNABLE… « Jésus
disait : si la chair est
venue à l’existence à cause de l’esprit, c’est une
merveille, mais si l’esprit
est venu à l’existence à cause du corps, c’est une
merveille de merveille. mais moi, je
m’émerveille de ceci : comment cet Etre
qui Est, peut-il habiter ce
néant ? » (Thomas – Logion 29) Un jeu de mots
peut souvent cacher une vérité, surtout lorsque celle-ci remet en question
des acquis, des idées toutes faites, mais aussi des rêveries auxquelles
s’accrocherait notre faiblesse humaine à la recherche d’un soutien, voir
d’une vraie béquille. La vie
d’aujourd’hui supprime de plus en plus les respirations, dont notre esprit a
besoin pour garder sa stabilité. C’est comme celui qui, faisant une activité
physique, a besoin de s’arrêter pour reprendre son souffle afin de ne pas
s’effondrer épuisé. Dans le domaine de
la soi-disant spiritualité les choses ne différent pas beaucoup. Lorsque la psyché
est éprise d’une vision allégorique, relative à une conception métaphysique
de l’existence et qu’elle se complaît dans l’impression d’une ascèse aussi
impalpable qu’irréelle, l’Homme perd le sens de la concrétude et son esprit
dérive vers un infini fictif. Beaucoup d’églises
ont vendu des expériences dites « de béatitude » ou « ascétiques »,
attribuées à des personnages qu’un bon psychiatre aurait pu soigner, plutôt
que de les laisser élever à référents moraux de ceux qui, malgré ou bon gré,
se laissaient manipuler. Face à cette sorte
d’escroquerie intellectuelle et éthique, il ne reste qu’une défense :
l’usage de la raison, privilège de l’être humain et de l’Homme libre. \ Après ce préalable, regardons les
étymologies des mots : Raison ; Raisonnable ; Esprit ;
Spirituel. RAISON Du latin : ratio,
signifiant (Cicéron)
raison, lumière, puissance d’âme. (Horace)
argumentation, discours. (Tertullianus
et César) pensée, dessein, conseil, partis, intention. Dans
la langue française (Descartes et Louis de Broglie) faculté pensante et son
fonctionnement, chez l’homme ; ce qui permet à l’homme de connaître, de
juger et d’agir conformément à des principes. (André Gide, Molière,
Anatole France) Discernement, jugement, sagesse, bon sens. (Dans l’acception
philosophique de D’Alembert) Connaissance naturelle opposée à ce qui vient de
la révélation ou de la foi. RAISONNABLE (Adjectif
du 1265) doué de raison, intelligent, pensant. Qui pense selon la raison, se
conduit avec bon sens et mesure, d’une manière réfléchie. ESPRIT Du latin : spiritus,
signifiant (Cicéron)
respiration, faculté respiratoire. (Plinius)
vent, air. (Virgile)
âme Dans
la langue française Souffle divin,
inspiration provenant de Dieu. Principe de vie incorporelle de l’homme.
Emanation des corps. La réalité pensante. Le
principe pensant en général opposé à l’objet de la pensée. Principe de la vie
intellectuelle opposé à la sensibilité. SPIRITUEL Qui
est esprit, de l’ordre de l’esprit considéré comme un principe indépendant. Propre ou relatif à
l’âme, en tant qu’émanation et reflet d’un principe supérieur. \ Pour se cantonner
à l’intérieur d’un développement maçonnique de cette planche, revenons à la
définition illuministe de la F\M\,
c’est-à-dire : le Temple de la Raison. Or nous savons que
toutes les théories philosophiques européennes issues de l’époque des
Lumières, ont préparé la pensée humaine à un positivisme scientifique
d’abord, matérialiste après et techno-industriel aujourd’hui, lequel a fait
dériver l’attention pour l’objet concret et pour la vérification
phénoménologique depuis l’expérience vers un simplisme rationaliste. Par conséquent
presque deux siècles de philosophie ont éloigné l’humanité du non directement
percevable ou observable. Cela ne pouvait qu’induire une séparation conflictuelle
du rationnel et du spirituel. Le premier restant du domaine scientifique, le
second de la compétence du confessionnalisme religieux. Aujourd’hui que la
physique nous a ouvert les portes de la non-matière, du synchronisme
temporel, de la dématérialisation, comment la F\M\peut-elle éviter
de tomber dans le dogme rationaliste et offrir à ses membres la voie de
l’évolution de la pensée, dans la plus grande liberté ? Encore et
seulement par l’usage de la Raison. Les blocages à
l’usage libre et normal de l’intelligence peuvent être de différente
nature : dus à des pathologies, à des manipulations, à la mauvaise foi,
à l’ignorance, à la paresse intellectuelle et bien d’autres encore. Les
blocages engendrés par les dogmes résument tout cela ensemble : comme un
monstre mythologique et tentaculaire, le dogme nous guette, nous emprisonne
dans ses spires, nous détruit lentement mais souvent irrévocablement. Lorsque mon esprit
rebelle me permit de claquer la porte au catholicisme romain et au
christianisme, en général, j’ai eu comme une deuxième naissance ;
l’horizon se dégagea et les connaissances que j’avais acquises de mon vieux
professeur de philosophie prirent leur envol. Je compris que contrairement à
Icare on pouvait approcher le soleil sans faire fondre la cire des
ailes ; il suffisait de construire ces mêmes ailes avec la compréhension
rationnelle du réel et de ses phénomènes ; de reléguer le rêve au monde
nocturne ; d’apprendre les règles de l’aérodynamique et du vol. Le problème de
toutes les religions confessionnelles, s’imposant par le dogme, consiste,
d’un côte, à envelopper la connaissance d’un ésotérisme fumeux et
inaccessible ; de l’autre à enrober l’exotérisme de formes vides de
sens, de dictats inacceptables par le bon sens, et d’intérêts économiques à
la limite de l’escroquerie. La clé de voute de ce système est la
diabolisation de l’intellectuel ; le refus du raisonnement, comme signe
évident de la manipulation du « malin », muni de cornes, langue
fourchue, queue et sabots ! En Initiation l’ésotérisme
ne peut pas être un écran à la logique, il ne sert qu’à respecter une
progression dans la connaissance et à protéger notre tradition des
« consommateurs » de maçonnerie, toujours à l’affut d’expériences
excitantes et, pourquoi pas, porteuses d’affaires et de relations utiles. Je considère que
la question de la spiritualité dans une organisation initiatique laïque
moderne, doit être rapportée à la capacité d’en rationaliser la nature et la
démarche. Cela veut dire que pour appréhender le spirituel, le sensible,
l’impalpable, il faut le regarder en face, c’est-à-dire depuis notre raison. En tant que
maçons, bien installés dans le Temple de la Raison, nous devons donc nous
questionner sur celle-ci et sur son usage, avant de formuler une quelconque
hypothèse sur la prétendue spiritualité. \ Pourquoi la
raison ? Quel est son mobile ? D’abord sa
présence nous distingue des animaux. Ensuite une énergie d’action est le
mobile principal, car agir signifie travailler dans le sens d’un but et, afin
que ce dernier puisse être atteint, il faut respecter une structure logique
de fonctionnement de l’ensemble des actes nécessaires. On peut opposer à
ce simple raisonnement le fait que même un dictateur sanguinaire utilise
cette progression ; Torquemada et sa Sainte Inquisition ont du y
recourir. Une lunette spéciale permet d’observer la qualité de cette énergie
en action : l’équilibre,
l’harmonie, l’équité. Lorsqu’une action n’est pas équilibrée elle
engendre déraison et non pas
raison. Avoir raison, se faire raison
est souvent déraisonnable. On
n’agit pas pour avoir raison, mais pour s’exprimer. C’est le message
contenu dans l’étymologie du mot ; nous l’avons déjà vu ci-dessus. Lorsque l’usage de
la raison est la conséquence d’une volonté d’action équilibrée, la
rationalité, qui en est la manifestation concrète, engendre une pensée
philosophique riche et percutante. Une philosophie de progrès et pour
l’Homme ; une philosophie fondée sur l’équilibre, l’équité et sur
l’esprit profond des choses. C’est cette spiritualité, dans laquelle la
raison peut articuler ses agissements. Cette pensée se
manifeste et se développe dans un milieu qui a une connotation
fraternelle : une sorte d’ambiance familiale fondée sur l’estime
réciproque, sur l’affection et sur le désir d’avancer ensemble pour la
construction d’un monde meilleur, pourvu que l’on puisse y arriver ! Une telle ambiance
peut être confondue facilement avec une association de type mafieux ou
confessionnel. Cela peut être
vrai dans deux cas précis et donc à éviter savamment : 1.
Les relations
interpersonnelles ne se bâtissent pas autour de la recherche et du savoir,
mais autour d’intérêts personnels, d’affaires commerciales, de solidarité
ethnique ou politique. 2.
La fraternité est
ressentie comme une ascèse mystique due à la profonde méconnaissance de mots
tels qu’égrégore, quintessence, esprit, magie du rituel. Le rituel est
considéré comme la finalité d’une réunion maçonnique et non comme un outil de
travail dans certaines conditions. Il est très
important de rester équilibrés et avec les pieds bien sur terre, lorsque
cette ambiance se réalise, car quelque chose d’impalpable se met en marche
avec force et vigueur. Ce quelque chose est du domaine du sensible et du
subtil ; il travaille notre psyché ; mais sa finalité n’est pas la
manipulation des consciences et des cerveaux que des charlatans, se
définissant francs-maçons racontent du haut de leurs piédestaux fissurés et
moisis. Non. La finalité de celui que nous appelons l’égrégore, l’esprit, la
spiritualité n’est que l’éveil des consciences. Il est le propulseur de cette
fraternité, nous venant de la nuit des temps, qui doit construire des
consciences d’Hommes libres, jamais esclaves, ni du crédo, ni du dogme, ni
des fantaisies malsaines, ni des grades, ni des décors. Notre seule réalité est celle d’apprenti,
dans le silence, afin de pouvoir écouter notre cœur ; qui n’est pas un
signe de faiblesse, mais d’une grande force de caractère et surtout la
démonstration d’avoir pu et su entrevoir le « chemin de Damas ».
Bien évidemment pas celui de Paul, le soi-disant apôtre ; mais l’autre,
le vrai, celui qui était caché par l’ésotérisme de la raison ! Lorsqu’on cherche
un chemin il faut s’orienter, raisonner, analyser…la révélation, l’illumination
sont très bien pour écrire des livres et les vendre. Ou pour tromper les
foules ignorantes ; mais dans ce cas on quitte le domaine de
l’initiation, pour rentrer dans celui de la malhonnêteté. Dans ces
conditions, lorsque raison et spiritualité s’équilibrent réciproquement, le
plus grand travail produit par cette dernière est le changement, la
modification des jugements de valeur : un nouveau cycle s’ouvre pour les
Hommes. Souvent on considère cela un peu mystérieux. Combien de fois on a
entendu dire, d’un Homme devenu sage, qu’il était désormais étrange ? Au
risque de faire l’éloge de la folie, je ne peux pas renoncer à considérer le
Fou comme la quintessence de la sagesse… Ce mystère se
concrétise matériellement dans le progrès, dans la rupture avec les vieux
schémas dans lesquels l’existence trouve sa sécurité douillette. Et ce
progrès amènera un souffle nouveau dans la Vie. Une Vie avec des objectifs
moins éphémères, moins dépendants des lieux communs et des idées toutes
faites. Une Vie qui sera l’humus pour un Homme debout, raisonnant avec son
cerveau. C’est l’initié, celui qui a su faire face à la solitude, à la
dérision engendrée par sa différence. Un Homme qui saura aimer le concret, la
matière, car il sait qu’elle est la matérialisation d’un phénomène plus
complexe, le fruit d’un travail de la nature, dont l’abstraction mathématique
ou physique lui aura expliqué les secrets les plus profonds. Ce travail entre
abstraction et concrétude, entre rationnel et spirituel, crée la conscience
de l’Etre, ainsi bâti selon raison, mais dans la spiritualité désormais
libérée de toutes les scories des marchands du Temple. \ En conclusion de
cette analyse rapide et synthétique je tiens à vous rappeler que je n’ai fait
que suivre le sens de l’initiation maçonnique et l’étymologie des mots
employés. La F\M\ travaille au progrès de
l’Humanité, à sa libération, à son évolution hors des dogmes et des idées
préconçues. Comment pouvons-nous envisager une maçonnerie de bénis oui
oui ? Une maçonnerie de pratiques religieuses ? Une maçonnerie, où
la spiritualité serait l’alibi pour confirmer les épouvantails du
passé ? Une maçonnerie avec des gourous, des papes et des
empereurs ? Ce n’est pas ma maçonnerie. L’initiation, la vraie est pour
moi celle de Giordano Bruno, de Galileo Galilei, de Newton, de Bakounin,
d’Abd el Kader, de Giuseppe Garibaldi : tous des hommes, qui en risquant
leurs vies pour faire avancer l’Humanité, ont montré d’avoir beaucoup plus
d’esprit que les membres des clergés de tous horizons, qui prêchaient la
bonne parole depuis leurs fauteuils à ceux et celles qui allaient se faire
martyriser pour la simple et unique faute de ne pas penser comme eux. Je vous ai dit
tout cela, car le Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm contient dans
ses Rituels une dérive possible : celle de la théurgie. Cette science
est très compliquée ; elle ne peut pas être abordée sans une profonde
connaissance théorique et un solide équilibre mental. Dans ce domaine toutes les
perversions sont possibles. Alors, comment distinguer le bon grain de
l’ivraie ? Encore et toujours par l’usage pondéré de la raison. Gardez vos
conceptions métaphysiques pour soulager vos consciences, ne les imposez pas
aux autres ; soyez vigilants devant les vendeurs de bonne aventure, car
la fumées de leurs discours peut aveugler et étouffer l’esprit. Mes chers
Frères et Sœurs Apprentis et Compagnons fuyez ceux et celles qui méprisent
les intellectuels et les rationalistes, car c’est ainsi que l’on a fait bruler
les livres par l’Inquisition et les pires dictatures. Vous êtes rentrés
dans le Temple de la Raison, exigez de vos Maîtres qu’ils en fassent usage.
Dans le cas contraire ils se comporteraient comme des parjures. Et pour finir
très spirituellement : Que ceux qui ont
des oreilles entendent, que leurs yeux voient et que leurs âmes comprennent. Georges CARPINTIERI |
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